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Critique de Nastasia-B


Non, ce n'est pas pour écrire une critique que j'interviens car je n'ai pas lu ce livre et ne le lirai jamais, mais je n'ai pas réussi à trouver de case à cliquer qui corresponde. Aujourd'hui, cependant, je souhaiterais nous interroger collectivement (je ne m'exclus pas du nous, bien au contraire).

Quelqu'un d'éminent a dit une fois, je ne sais plus qui (parce que c'était quelqu'un de droite, voilà pourquoi ma mémoire défaille, elle refuse de se souvenir quand ça vient de ce côté) : " Les Français sont des veaux. La France entière est un pays de veaux. "

Qu'en est-il des lecteurs de Babelio ? Si l'on a la curiosité d'aller voir les 20 critiques les plus plébiscitées par les Babelionautes depuis la nuit des temps (c'est-à-dire depuis l'ouverture du site en 2007), on s'aperçoit vite que l'essentiel des avis qui sont donc les plus plébiscités concernent principalement des bouses intersidérales qui ne mériteraient même pas qu'on s'abîme la bouche à prononcer leur nom.

Et sur ces " top 20 ", pas moins du quart concerne un seul et même livre, les fameuses Cinquante Nuances de Grey. Édifiant non ? Quand bien même cela serait pour n'en dire que du mal, comme c'est le cas des cinq en question, qu'avons-nous besoin de donner une telle importance à un ouvrage pareil ?

Je vais m'efforcer de ne pas m'abaisser à en dire du mal car c'est lui donner de l'importance ce que je ne veux surtout pas, mais notre comportement, à nous tous, me questionne (et j'ai bien conscience que cette contribution même, de par le fait qu'elle existe, contribue elle aussi, malheureusement, au phénomène mais je n'ai pas trouvé d'autres moyens d'aborder simplement et de front la question).

Pourquoi un tel engouement, en bien comme en mal, sur Babelio ? Cinquante Nuances de Grey, tenez-vous bien, à l'instant où j'écris 558 critiques au compteur. Dans le même temps, je regarde Victor Hugo, Les Misérables, 47 critiques au compteur. Sommes-nous donc réellement tombés si bas ?

Oui, alors vous allez me dire, Okay Nastasia mais ton Victor Hugo n'officie pas exactement dans le même registre. Il n'y a pas d'accents coquins ni de sulfureuses vapeurs d'interdits qui s'en dégagent. Soit. Alors allons chercher dans la littérature d'authentiques chefs-d'oeuvre jouissant (ce sont les chefs-d'oeuvre qui jouissent, pas les lecteurs, je précise — pas encore du moins) d'une réputation sulfureuse : L'Amant de Lady Chatterley, roman à plus d'un titre exceptionnel, 47 critiques, pas mieux que Victor Hugo. Allons donc un peu plus loin dans les vapeurs de soufre : La Vénus À La Fourrure, lui aussi un roman réellement marquant et intéressant qui est à l'origine du terme de masochisme, que constate-t-on ? 6 malheureuses critiques au compteur !

J'aimerais donc qu'il y ait cinquante degrés de nuances mais le constat est malheureusement univoque et accablant. Nous sommes, il faut bien le reconnaître, nous tous collectivement, des veaux. De Gaulle avait raison. Sommes-nous tous obligés de gober ces cinquante nuances de fange de grey ou de force ? Sommes-nous donc tous tellement obligés, tous à des " de grey " divers, d'activer nos instincts moutonniers de Panurge ?

Soit je ne comprends rien de rien à la littérature, soit les éditeurs se foutent bien de notre gueule et par notre comportement grégaire écervelé nous les y incitons chaque jour un peu plus, à nous ruer à qui mieux mieux sur la dernière idiotie venue, simplement parce qu'elle est encore toute chaude. le silence, mesdames et messieurs, le silence. L'indifférence, voilà ce qui a toujours été l'arme absolue pour lutter contre l'indigence éditoriale et le mépris dont ils nous assaillent.

Nous leur donnons raison si nous en parlons. Que l'auteur écrive un livre de bas aloi et se fasse grassement payer pour ça, je dirais, tant mieux pour elle. Mais que les éditeurs nous infligent ça et que nous leur donnions raison, voilà qui me fait mal, très mal à la littérature et qui quelque part, un peu, me révolte. Oh oui ! Une fois encore, j'ai mal à ma littérature et mes plaies sont béantes.

Le silence radio, voilà comment nous devrions lutter contre les mille daubes qu'on nous jette en pâture pour nous vider l'esprit. Plus nous en parlons et plus nous répandons la gangrène. Ce que je dis des nuances de machin je ne sais quoi s'applique aussi à bon nombre des autres " Top 20 ". Top quoi ? je me le demande.

Souvenons-nous collectivement (moi la première, je me botte les fesses en même temps que j'écris cette non critique) que chaque critique que nous écrivons sur un livre qui ne vaut pas la peine qu'on en parle est une place que l'on prend pour un livre qui le mériterait. Les éditeurs n'ont pas de principes ; si les excellents livres se vendaient, ils proposeraient d'excellents livres, mais comme en ce moment tout l'espace est occupé par les bouses, ils s'imaginent logiquement avoir affaire à des veaux, c'est normal et c'est cartésien.

Faisons de Babelio un lieu de résistance, boycottons les livres qui se foutent ouvertement de notre gueule, même pour en dire du mal car c'est leur donner trop d'importance. Silence = non vente, non vente = diversification de l'offre à d'autres types d'ouvrages. Donc on a tous à y gagner à laisser muets nos claviers sur ce genre de produit que je répugne à désigner par le noble terme de roman.

Mais ce ne sont là que les cinquante nuances d'un avis fort gris et fort discutable, c'est-à-dire pas grand-chose en terme éditorial...
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