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Critique de kade_read


Voilà un roman qui se résume vite. Vite, car en réalité on a l'impression qu'il ne se passe pas grand chose … Je dis bien l'impression … le style épistolaire est sympathique, bien qu'un peu déroutant au départ. Mais, on s'y fait rapidement et on prend goût à lire ces lettres un peu « dérangées ». Quoiqu'on puisse en penser en refermant ce livre, on ne peut indéniablement pas lui rester indifférent. Qu'on aime, qu'on déteste ou qu'on reste dubitatif, ce roman provoque inévitablement un sentiment étrange. Pour ma part, j'ai eu le sentiment de voyager dans l'esprit schizophrène d'une jeune femme aux personnalités multiples.
Pourquoi ai-je eu ce sentiment ? Eh bien, dans un premier temps parce que chaque lettre est rédigée dans le même registre et use des mêmes figures de style. Ce qui ne nous permet, pour ainsi dire, pas de différencier les trois personnages récurrents. de ce fait, les protagonistes ne développent pas réellement d'univers rien qu'à eux. Heureusement que les noms des auteurs des missives apparaissent à la fin des lettres. Dans un second temps, il m'est rapidement apparût que nous voyagions à travers un des délires de trois des visiblement nombreuses personnalités de Noémie. Si ces lettres étaient adressées à des personnages réels et distincts, le postulat de base ma paraîtrait peu plausible. En effet, comment une femme peut-elle décemment imaginer envoyer une lettre à son ex belle-mère afin de se plaindre de son fils qui refuse de l'implorer à genou ? Et comment s'imaginer qu'une mère, aussi imparfaites puissent-elles être parfois, répondrait à cette femme en lui proposant de tuer son fils puis de le dévorer à un festin ? Il m'a semblé saisir du doigt la bonne solution lorsque Noémie a avoué être schizophrène. de plus, plusieurs fois on a pu remarquer que certains personnages s'effaçaient complètement au profit d'autres. Quand les personnages secondaires d'une multiple personnalité passe « dans la lumière » ; c'est-à-dire, qu'elles se mettent au devant de la scène ; le personnage central (ici Noémie) s'efface. Il s'agit de phase. Parfois, ça peut durer une journée, une semaine ou même un mois. le personnage central se bat généralement pour faire respecter un semblant d'ordre et de règles dans cette petite communauté imaginaire. Je dois avouer que ce côté un peu psychologique m'a beaucoup plu, bien que j'aurais aimé que ce soit plus clair. Plus clair parce qu'en discutant de ce roman avec des proches, je me suis rendu compte que peu de personnes avait fait le même constat que le mien et pensait suivre la vie de deux mégères qui s'étaient étonnamment retrouvées sur les chemins de la folie et du crime. La question que je me suis donc posé est la suivante : Est-ce une oeuvre où plusieurs théories sont possibles et qui ne donne de réelle solution à personne ? C'est possible, oui ! Et si je me trompe sur le coeur même de l'histoire, et bien force me sera de constater mon H.S. Mais surtout, je ne comprendrais pas l'incohérence d'où part l'histoire.
Le roman épistolaire a tendance à poser des barrières assez importantes. Ce style ne permet pas à l'auteur d'ancrer un paysage, une odeur, un ressenti ou même un contexte par les descriptions. C'est quelque chose qui peut parfois bloquer certains lecteurs car ce genre demande beaucoup d'imagination. On a un peu l'impression que c'est notre propre imaginaire qui crée l'histoire. On suit simplement un fil conducteur, mais brodons le reste tout autour. Généralement, on aime ou on aime pas. Pour ma part, j'étais un peu dubitative au départ. Puis, au fil de ma lecture j'ai pris plaisir à faire vivre ce (ou ces) personnages dans mon propre imaginaire.
J'ai remarqué également que l'auteur, bien qu'il soit lui-même un homme, semblait avoir prit le parti des féministes. Oui, mesdames les engagées à la cause, n'hésitez pas à lire ce livre. Il vous épanouira tant il rabaisse clairement l'homme … Presque plus bas que terre. En tant que femme qui ne prône pas l'égalité des sexes mais la complémentarité des sexes, je trouve ça peu approprié d'essayer de glorifier la place des femmes en rabaissant les hommes. Si réellement ce qui est recherché n'est que l'égalité des sexes, pourquoi rabaisser les hommes au lieu de démontrer, par A + B, qu'une femme est autant capable ? Diminuer quelqu'un ne signifie pas, pour moi en tout cas, être meilleur … 
Une phrase dans ce roman m'a un peu choqué. Je l'ai trouvé déplacé et presque irrespectueuse. La voici : « Je fus du nombre, mais ce matin je me sens une âme d'épouse de moudjahidin, humble crachoir dans lequel s'égouttent les terroristes avant de s'en aller massacrer nos dessinateurs. » - Je pense que tout le monde aura fait le rapprochement avec les attentats qui ont touché Charlie Hebdo … Je ne sais pas … Je trouve ça tiré par les cheveux de faire adhérer cette femme aux pratiques des terroristes, même si ça ne dure qu'une phrase. À mes yeux, et je parle vraiment personnellement, certains sujets doivent être respectés. N'oublions pas que des hommes sont morts dans d'atroces souffrances et que derrière eux, il reste quand même leurs familles qui doivent vivre avec ça jusqu'à la fin de leurs jours. Je comprend ensuite ceux qui défendront cette réplique parce qu'ils aiment les satires autant qu'ils aiment les caricatures de Charlie Hebdo. Encore une fois, il ne s'agit là que de mon ressenti de sensible (peut-être, un petit peu).
Moi qui suis généralement en admiration devant les figures de style dans les romans, cette fois-ci, je me retrouve complètement lassée. Dans la vie comme en littérature, rien n'est bon dans l'excès ! Et là, trop c'est trop ! Ce travail lorsqu'il parsème un texte a tendance à poétiser une histoire, à l'adoucir. Ici, c'est tout l'inverse puisque ça devient très très lourd. Une lourdeur qui s'en ressent brutalement puisqu'à 50 pages de la fin, on a l'impression que le roman s'essouffle … Et nous avec ! Il ne se passe plus rien, si ce n'est des échanges sans intérêt entre Jeanne et … Et Jeanne, puisque plus personne ne lui répond.
En résumé, j'ai apprécié ce roman qui nage subtilement avec un important trouble psychologique : le dédoublement de personnalité. Je regrette simplement que cette maladie n'ai pas été davantage abordée afin de rendre la fin plus explicite (pour moi, Jeanne a finalement voler « la lumière » aux autres et en refusant de léguer sa place, elle a, de ce fait, bannit Geoffrey et Noémie). Seule la lecture de ce livre vous permettra de vous faire un avis sur le véritable sens de cette histoire. N'attendez pas de tomber sur un chef d'oeuvre, mais quoiqu'il en soit sur un genre particulièrement intéressant et déstabilisant.
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