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Critique de Dinoscope


A croire que j'avais envie d'évasion ! En effet, l'illustration de Gabriel Gay en couverture de l'édition de Bourgois Éditeur m'invitait au voyage dans les vallées du grand ouest américain, sur les traces des pionniers du train.
Et pourtant, c'est dans les années d'entre-deux guerres que nous embarque ce court roman de Denis Johnson. Et plus exactement sur les traces de Robert Grainier, « cet homme dont on aurait pu dire qu'il avait peu de centres d'intérêts dans la vie, mais on ne disait rien sur lui ».
Denis Johnson nous donne effectivement l'impression d'avoir brodé ce roman autour d'une courte notice biographique tirée des archives d'un comté dépeuplé de l'Idaho : Robert Grainier est un homme lambda, avec ce tout ce qu'il faut de médiocrité pour le rendre profondément humain ; un mari et un père qui fait le deuil d'une famille disparue, passager d'une époque de grandes mutations.
Que ce soit par la littérature ou le cinéma, grâce à Morris ou Sergio Leone, nous nous sommes tous créé un imaginaire autour du grand ouest américain, conquis au rythme de l'avancée des voies de chemin de fer. Mais nous sommes nous intéressés à ce qui se passait après ? Rêves de train nous emmène dans l'ouest une fois conquis. le réseau ferré y est en cours de rationalisation notamment par la construction de ponts qui contribuent à réduire les temps de trajet et à figer dans le temps les territoires où le train ne passera plus.
Quiconque a déjà pris le train, s'est forcément imaginé, le front collé à la vitre, à quoi pouvait ressembler la vie sur ces territoires qui défilent sous nos yeux. Nous avons tous essayé d'imaginer celui ou celle qui habitait cette petite maison, à l'horizon : quelqu'un dont la vie est rythmée par le bruit du train dans la vallée. C'est en tout cas mon cas et le sentiment que j'ai eu à la lecture de Rêves de train.
Passager du train de la vie, Robert Grainier vit de son labeur sur de grands chantiers. Lorsque sa propriété et sa famille son dévastés par un violent incendie de forêt, l'homme se résigne à reconstruire son chalet l'été, trouvant du travail dans l'état du Washington l'hiver. Il finit par faire l'acquisition d'un chariot lui permettant de louer ses services pour la livraison et le transport, s'installant ainsi durablement sur sa propriété.
« Grainier vécut plus de quatre-vingts ans, jusque dans les années soixante. En sont temps il avait voyagé vers l'ouest pour s'arrêter à quelques douzaines de miles de l'Océan Pacifique, un océan qu'il ne vit jamais, et vers l'est jusqu'à la ville de Libby, quarante miles à l'intérieur du Montana. Il avait connu un seul amour, sa femme Gladys, et possédé un seul arpent de terre, deux juments et un chariot. Il n'avait jamais été ivre. Il n'avait jamais acheté une arme à feu, ni parlé dans un téléphone. Il avait régulièrement voyagé en train, maintes fois en automobile, et il avait pris l'avion une seule fois. Au cours des dix dernières années de sa vie, il regardait la télévision dès qu'il était en ville. Il n'avait pas la moindre idée de l'identité de ses parents et ne laissa derrière lui aucun héritier. »
Difficile de retranscrire les impressions laissées par ce roman dans lequel je me replongerais avec curiosité. Une fois terminé, j'ai connu un de ces moments de contemplation, comme on peut le vivre devant un tableau ou une photo, le temps de laisser infuser toute l'essence de l'oeuvre. Rêves de train est un roman qui m'a touché par son authenticité et une forme de sincérité. A certains égards, nous sommes tous Robert Grainier, menant des vies relativement anecdotiques mais qui méritent pour autant qu'on leur consacre un roman.
Lien : https://www.dinoscope.photo/..
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