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Critique de Bookycooky


Nástegallu son faon est tué . Par LUI. Elle l'a vu. Dans sa tête monte un grondement effrayant….l'idée qu'un jour elle le tuerait.
Elle, c'est Elsa, une grande fille de 9 ans qui découvre le meurtre de son renne préféré, en allant les nourrir. Une mère revêche rivgu ( non sami) qui vient de la ville, un père affectueux, un frère ado protecteur, une grand-mère fofolle qui conduit sans permis,……. Elsa même si elle semble bien entourée, est seule. le meurtre de Nástegallu va encore plus l'isoler , l'enfonçant dans un mutisme qui s'aggravera avec la perte d'un être cher.
Nous sommes chez les Samis un des derniers peuples autochtones d'Europe, dans une famille éleveuse de rennes dans un village au nord de la Suède. le temps d'une lecture on va s'immiscer dans leur vie difficile, survivant à des conditions climatiques (à -8°C il ne fait pas aussi froid que ça ❄️) et naturelles extrêmement rudes, entourés de communautés non-sami hostiles ( « Pourquoi devraient-ils faire attention à ces saloperies de rennes, les bêtes des Lapons »). Une cohabitation complexe dû au racisme, où la langue en trace la frontière dans ces villages où chacun sait quelle est la langue de prédilection de l'autre. Mais leur souci primordial est le massacre de leurs rennes, leur principal source de revenu, farouchement abattus par les braconniers alors que la police locale ne se déplace pas, prend des dépositions, mais les classe vite sans suite.

Dans le fond une histoire très triste de l'isolation d'une communauté en milieu hostile dans la neige et le froid , qui doit faire face au racisme, aux insultes sur les réseaux sociaux, aux prédateurs qui massacrent leurs rennes, aux grignotements de leur terre au profit des mines, pourtant, ..... une luminosité irradie à travers les petits événements, les détails, les relations et cette neige sans fin: Elsa qui adore arborer un kolt** flambant neuf et être admirée au marché de Jokkmokk, s'allonger dans la neige et regarder un guovssahasat (aurore boréale)en s'égosillant « Bonjour guovssahasat ! Je t'entends. », bien que chez les samis il ne faut pas narguer les aurores boréales, même pas sortir les regarder, Elsa et son amie qui se blottissent derrière la luge alors que le grand frère et l'oncle font la course, Elsa qui murmure à l'oreille de son faon, Et Elsa grandissant et aspirant aux rôles traditionnellement masculins…..
Un autre portrait de femme sami magnifique est celui d'Hanna, et enfin LUI aussi répond présent avec son histoire de famille, et en pleine besogne exécutant ses crimes , proférant ses menaces à l'encontre d'Elsa, accentuant ainsi la dimension du drame vécu par ces éleveurs pour qui les rennes sont leur vie. Ce qui m'a le plus frappée dans cette histoire c'est le comportement de la population suédoise du coin,et du gouvernement suédois à travers ses agents de l'ordre. Un pays qui se veut démocratique, défenseur des droits de l'homme, grand moralisateur, s'avère être raciste et pleine de haine envers l'élément étranger, qui en faites ne s'agissant même pas d'immigrés. Au lieu de se vanter des droits qu'ils confèrent aux kurdes et autres immigrés , ils devraient plutôt s'enquérir des droits des samis qui vivent depuis toujours sur leur propre terre et qui s'avère être aussi malheureusement partiellement en Suède.


Okta, Guokte, Golbma, Njeallje, Vihtta…..Un, Deux, Trois, Quatre, Cinq…. Les titres de chapitres sont les chiffres qui se suivent en sami, au total en Gávccilogiguhtta (86) chapitres Ann Helene Laestadius nous raconte l'histoire poignante et émouvante d'une communauté et d'une femme qui luttent pour leurs rennes , pour leur survivance !

"Être sami, c'est porter son histoire avec soi."


* Tache blanche en langue sami.
**Kolt , costume folklorique des samis aux couleurs rouges et bleus et décoré de broches couleur or.
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