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Critique de Sachka


Installez-vous confortablement, je vous emmène à Sainte-Marine, charmant petit port breton qui salue fièrement l'Odet, situé sur la côte sud-finistérienne. Vendredi 7 août en fin d'après-midi, retour de plage, me voilà rendue à Sainte-Marine, je n'ai pas pu résister à fouler les pas de J.M.G. le Clézio qui, avec ce merveilleux roman, nous transmet tout son amour pour la Bretagne.

Je m'installe au bout de la Cale à la terrasse ombragée et joliment bordée d'hortensias du café qui porte le même nom (le Café de la Cale), je commande une bolée de cidre et j'admire la vue. Je la connais par coeur cette vue mais à chaque rendez-vous c'est comme si je la decouvrais pour la première fois, moment magique !
Un arc-en-ciel de petits bateaux de pêche et d'annexes colorés sont amarrés à quai ou maintenus à l'ancre pour le mouillage : jaunes, verts, rouges, bleus... le reflet scintillant de leurs coques se confond avec cette teinte si particulière, entre le vert et le jaune, que prend la mer l'été dans le port de Sainte-Marine. Non loin, le P'tit bac s'en va dodelinant tranquillement sur les flots en direction de Bénodet pour la énième fois de la journée...

J'ai le coeur léger quand je lis un roman de le Clézio, ça me rend toute chose, c'est doux, c'est beau comme un poème, comme cette "Chanson Bretonne" avec laquelle il partage avec nous ses souvenirs d'enfance, les souvenirs du petit niçois alors âgé de dix ans qui passe tous ses étés en famille dans la maison de madame Helias à Ker-Huel au début des années cinquante.

Je me suis plongée avec délice dans cette Bretagne que je n'ai pas connue mais qui ressemble à celle que me racontait ma grand-mère. La boutique Biger, disparue aujourd'hui, l'unique dépôt de pain du village ; la pompe communale, seule source d'eau potable, dont la tâche incombe deux fois par jour aux gosses du village d'aller y récupérer l'eau. Ces mêmes gosses pour la plupart des fils et filles de marins ou de pêcheurs locaux qui se réunissent chaque après-midi à l'embarcadère (là où je suis en ce moment même) pour regarder passer le bac, véritable attraction (ça l'est toujours) ou discuter en breton, la langue de leurs parents et de leurs grands-parents, qu'ils perdront une fois devenus adultes car comme le dit si bien l'auteur : "le breton c'est la langue de l'enfance, celle dont ils n'auront pas besoin pour gagner leur vie et faire de longues études", Yanick, Soizig, Fanc'h, Erwan, Pierrick, tous autant qu'ils sont, les gamins de Sainte-Marine... Mais Sainte-Marine c'est aussi l'odeur de l'eau aux abords de la cale, "le ster ar Sorenn", la rivière du sommeil, ce mélange de vase et d'iode que j'aime tant ; c'est l'odeur poivrée de la "lann" , des ajoncs, qui vous titille les narines ; c'est le bruit du ressac des vagues que vous pouvez entendre au loin le long de la plage de Pen Morvan. Sainte-Marine c'est tout ça et bien plus encore, vous le découvrirez en lisant ce très joli conte.

À la suite de ce premier conte, l'auteur nous fait cadeau d'une cinquantaine de pages toujours sur la thématique de l'enfance avec "L'enfant et la guerre", un récit que j'ai pour ma part trouvé très émouvant. Lui qui est né à Nice le 13 avril 1940 en pleine guerre, a ressenti le besoin de coucher les mots sur le papier. Il a trois ans quand une bombe s'écrase dans le jardin de l'immeuble situé Quai Carnot à Nice où il vit avec sa grand-mère, sa mère et son frère aîné, les obligeant à fuir vers le village de Roquebillière dans l'arrière pays niçois. Il nous raconte Roquebillière, il nous raconte ses habitants, mais aussi combien la guerre est la pire des choses qui puisse arriver à un enfant. Ce récit c'est la naïveté touchante et le rire d'un enfant qui ignore à quel point le monde des adultes peut être cruel.

Deux très beaux récits à l'écriture contemplative et poétique qui abordent des sujets tels que la guerre, la religion, les traditions, l'histoire de la Bretagne. Il y a de la nostalgie dans l'écriture de J.M.G. le Clézio mais c'est une nostalgie joyeuse, une nostalgie qui vous rend heureux.

Ce billet il est pour la maman d'une amie rochelaise qui m'a conseillée cette lecture et je l'en remercie vivement. Pour conclure, je vous invite à chanter avec moi le célèbre Bro gozh ma zadoù (vieux pays de mes ancêtres) dont la version a été reprise maintes fois, par les Tri Yann et Alan Stivell entre autres.

C'est parti !

O breizh, ma Bro, me gar ma Bro
Tra ma vo mor'vel mur'n he zro
Ra vezo digabestr ma Bro !
Breizh, douar ar Sent kozh, douar ar Varzhed,
N'eus bro all a garan kement' barzh ar bed
Pep menez, pep traonienn, d'am c'halon zo kaer,
Enne kousk meur a Vreizhad taer !


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