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Critique de Bruno_Cm


Livre très très intéressant que je recommande presque sans réserve. Même pour ceux qui ont déjà beaucoup lu sur ces questions et thématiques et problématiques, du trauma, de la mémoire, de la conscience, des thérapies diverses. Il résume à sa façon tout ce qu'il semble utile de savoir et propose des pistes praticables et des pistes de croissance dans la connaissance, des pistes de recherche.

« Ce livre porte sur comment nous pouvons apprendre à nous réconcilier avec les souvenirs qui nous obsèdent et nous libérer de leur tyrannie. »

« L'hypothèse centrale de ce travail est le fait que notre état émotionnel du moment est peut-être le principal facteur déterminant ce dont - et comment - nous nous souvenons d'un événement particulier. »

Levine met un accent essentiel sur les souvenirs procéduraux :
« L'existence de souvenirs procéduraux se situant bien au-dessous de la conscience en état d'éveil est la clef du travail clinique sur les souvenirs traumatiques et constitue le thème centra de ce livre. »

Levine et sa si intéressante Somatic Experiencing :

« Bien que la Somatic Experiencing [...] travaille sur les souvenirs procéduraux avec bien plus de douceur, aucune thérapie n'est infaillible. Je dirais cependant que le processus davantage progressif et titré de la SE présente une plus grande marge de sécurité, ce qui diminue les risques de re-traumatisation par rapport à l'EP et aux autres thérapies cathartiques,. J'espère sincèrement que les thérapeutes qui utilisent les méthodes d'exposition vont se servir de quelques-uns des outils présentés ici pour enrichir et faire progresser leur travail thérapeutique. »

Sont insérées des séances de cas cliniques avec des photos (qui sont trop pour moi trop nombreuses et ajoutent peu au propos ; c'est un de mes rares voire mon seul bémol), où l'on voit-comprend fort bien le processus déployé.

Le corps, le corps, le corps, le corps, le corps.

Levine nous met en garde concernant l'hypnose et la capacité à provoquer, à créer des faux-souvenirs, l'importance de la suggestion :

« Pour ceux qui pratiquent l'hypnothérapie (ou hypnoanalyse), il y a souvent un facteur suggestif intrinsèque. L'hypnose est en effet quelques fois définie comme un état accru de suggestibilité. de ce fait, ce type de thérapies nécessite une formation poussée, des compétences et beaucoup de prudence. »

Levine critique et repose toute la question des faux-souvenirs :

« Quoi qu'il en soit, le travail d'Elizabeth Loftus et ses collègues [...] montre que l'implantation de faux souvenirs, de même que celle de "faux souvenirs traumatisants", est relativement facile à faire par différentes techniques suggestives. Même si les thérapeutes doivent rester vigilants quant à la possibilité d'induire de faux souvenirs, ce que Loftus semble ne pas comprendre pleinement est la nature essentielle et l'importance (et fixité) des souvenirs procéduraux dans le cas du traumatisme. Elle ne semble pas non plus considérer suffisamment les implications thérapeutiques de la façon dont les souvenirs sont intrinsèquement en flux constant, sans cesse réécrits tout au long de notre existence à mesure qu'ils progressent vers plus de sentiment de puissance et de paix. La véritable question est la suivante : dans quel but et par qui les souvenirs sont-ils réécrits ? »

Concernant le « rêve » d'effacer la mémoire, Levine nous fait comprendre à la fois que c'est possible (ou presque ou bientôt) et que c'est quasi impossible également. La science, les scientifiques, les labos pharmaceutiques, les valeurs de la société, comment on a déjà pensé cela, comment on l'a figuré (passages du film Eternal Sunshine of the Spotless Mind...)

« Nous vivons à une époque où l'effacement des souvenirs traumatiques ou autres est une possibilité bien réelle. Toutefois, nous allons voir que les médicaments pour "effacer la mémoire" sont plein de pièges, d'inconvénients intrinsèques, et de courants dissimulés dans le meilleur des mondes qu'est celui de la médecine moléculaire de la mémoire. »

« Les groupes pharmaceutiques avancent à grands pas dans la recherche sur les médicaments susceptibles d'effacer la mémoire (dans le but d'effacer les peurs et les phobies des patients) et il n'u a aucune raison de penser qu'ils ne vont pas dépenser des centaines de millions (pour ne pas dire des milliards) de dollars pour fabriquer et commercialiser de tels produit. Il est probable qu'une pression sera ensuite exercée sur le Congrès pour que l'encadrement de leur utilisation soit minimal et que la publicité téléviser et sur internet soit irrésistible - et ce malgré les effets secondaires et les abus possibles. La possibilité d'une manipulation de masse en vue de gain politiques et financiers ne peut pas non plus être écartée ou ignorée. »

« L'effacement de la mémoire est aussi peut-être significatif de la tendance de notre société à une forme de paresse qui ne cherche de solution que médicamenteuse, que ce soit des antidépresseurs, des stimulants, des traitements contre l'anxiété ou l'insomnie, etc., au lieu de faire appel à sa propre créativité pour développer sa résilience et son autorégulation. »


« Enfin, ainsi que Henry Ward Beecher est sensé l'avoir dit : "Le malheur ne vient pas à nous pour nous attrister mais pour nous rendre pondérés ; non pour nous désoler mais pour nos rendre sages". Je conclus avec l'espoir que cet ouvrage contribue, à sa faible mesure, à notre sagesse collective de la compréhension de la façon dont nous nous réconcilions avec nos souvenirs et nos sentiments pénibles. »



L'utilité voire l'exigence de se souvenir même des « malheurs » pour progresser, pour ne pas reproduire ces erreurs, pour grandir, pour évoluer. On ne doit pas effacer, on doit vivre avec, soigner les blessures, grandir encore, tel est plutôt le message de ce beau livre riche. Plein d'espoir aussi.
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