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Critique de Zephirine


Tout d'abord, il y a tout ce blanc. Blanc du papier, blanc des combinaisons de ces femmes qui « parlent une autre langue. » Et puis il y a la noirceur des mots à laquelle fait écho le noir des monotypes de Pascaline Wollast dans des dessin dépouillés et légers.
« Elles parlent une autre langue, portent une combinaison très blanche. Leur tête est couverte d'une casquette. C'est comme ça qu'on les reconnait. »
Sur la ligne de crête qui sépare prose et poésie, on découvre le monde sans compassion d'un pays étranger, d'où ce titre « On a changé de pays ». Tout y est aligné, aseptisé et incompréhensible. On peut quitter ce monde, mais… on ne sait trop comment s'y prendre. Il faut apprendre une autre langue dans ce lieu où règne le silence. Ce lieu déshumanisé que l'on cherche à fuir, ce pourrait être un centre pour personnes déplacées, un hôpital psychiatrique, un service de gériatrie, où tout lieu où la liberté s'abolie et ou l'individu se replie sur lui-même. C'est écrit avec une sobriété de mots, comme pour alléger la peine que représente l'enfermement.

Dans la seconde partie intitulée « L'autre nuit », on pénètre en un lieu plus exigu
« Te voilà chez toi, duvet ajusté à la peau. » et l'auteure raconte ce « temps mi-clos, peuplé de parfums tactiles. » en utilisant le tutoiement pour abolir la distance et l'espace. « Tu » est cet humain fragile replié sur lui-même, dans un cocon, un nid pour l'escale, un terrier douillet. On se rapproche des bêtes, qui savent si bien se blottir ou se cacher : lapereau ou oiseaux. Et on redevient cet enfant pelotonné qui se souvient de son premier abri, premier nid.
« La vie en boucle te ramène au premier nid. Des bras d'une mère au ruisseau du matelas, il y eut des angles, des caps, tant et tant de cubes et de roches. »
Ce nid protecteur et si doux, un jour, il faut bien le quitter, peut-être pour un départ définitif. Ce sera fait avec douceur, sans drame.
« Il fait blanc, le grand drap s'orne de ton souffle, flotte et respire. Je n'entends que le bruissement farceur des feuilles. Il fait libre. »
De tous ces petits riens, de ces choses intimes, l'auteure construit son récit comme on construit un nid, mot après mot. Elle le raconte, ce nid, en usant d'une écriture sans artifice, avec une simplicité assumée.

Ce recueil d'une élégance dépouillée et aux illustrations sobres est à lire, à feuilleter pelotonné dans son lit, dans le creux d'un profond divan ou caché dans le foin. Mais qu'importe le nid pourvu qu'on y soit bien.
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