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Critique de MarcelineBodier


Pas évident d'écrire sur Un souffle de vie. C'est un livre qui se présente avec un fil conducteur ténu, autour des réflexions d'un auteur, appelé « l'auteur », et de son personnage, Angela Pralini. Tous deux expriment des doutes, des angoisses, des réflexions sur la vie et la mort. Alors résumons. Une auteure qui crée un auteur qui crée un personnage qui écrit aussi (et qui a un chien) : autant dire que les situations deviennent rapidement complexes, voire inextricables. Voyez un peu : « l'auteur » se dit amoureux de son personnage ; « l'auteur » lit superficiellement ce qu'écrit son personnage pour ne pas la copier ; « l'auteur » fait écrire à son propre personnage que sa vie est un roman... Et je rappelle que « l'auteur » est lui-même le personnage de Clarice Lispector. Bien sûr, c'est plus simple qu'il n'y paraît puisque c'est bien une seule personne qui est derrière tout cela : Clarice Lispector. On a finalement l'impression d'un jeu de miroirs internes, qui n'est pas sans poésie.

Mais un tel livre peut-il se suffire à lui-même ? L'auteure donne peu de clés et on a donc l'impression que pour en apprécier pleinement la lecture, il faudrait connaître tous ses autres livres, sa vie et même sa mort. Il faudrait pouvoir le situer ; ce livre a du mal à exister sans elle. Est-ce que cela ne le rend pas incommuniquable ? La possibilité d'exister indépendamment de son auteur, c'est justement un critère pour définir la frontière entre un livre (éventuellement autobiographique) et un journal intime. Un souffle de vie m'a paru relever davantage du journal intime que du livre communiquable. D'où mon sentiment d'être restée sur le seuil, mais aussi, c'est vrai, d'avoir eu accès, sans filtre, à des révélations poétiques auxquelles n'ont en principe accès que les psy ou les confesseurs. Alors je vous livre un exemple qui m'a frappée, un rêve qui peut largement se lire indépendamment du reste du livre et parlera, je pense, à beaucoup :

« Cette nuit j'ai fait un rêve dans un rêve. J'ai rêvé que j'assistais tranquillement à une pièce de théâtre. Et par une porte mal fermée sont entrés des hommes avec des mitraillettes et ils ont tué tous les acteurs. Je me suis mise à pleurer : je ne voulais pas qu'ils soient morts. Alors les acteurs se sont relevés et ils m'ont dit : « Nous ne sommes pas morts dans la vie réelle, mais en tant qu'acteurs, ce massacre fait partie du spectacle. » Alors j'ai fait un rêve très agréable que voici : dans la vie nous sommes les acteurs d'une pièce de théâtre de l'absurde écrite par un Dieu absurde. Nous sommes tous les participants de ce théâtre : en vérité nous ne mourons jamais quand survient la mort. C'est l'acteur qui meurt en nous. Serait-ce l'éternité ? »

Plus que du livre dans son ensemble, c'est de passages comme celui-là que je me rappellerai. Merci aux éditions des femmes Antoinette Fouque, et à Babelio.
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