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Critique de Erik35


QUATRE BOULES DE CUIR... BOXE ! BOXE !

Innombrables sont les intellectuels, artistes, écrivains, journalistes et autres stars du "show-bizz" s'étant pris d'affection pour le "noble art". Et même si ce sport de combat - la boxe anglaise - est moins en cour qu'après guerre (qui n'a jamais entendu parler de la belle et tragique , histoire d'amour entre Edith Piaf et le grand champion français Marcel Cerdan ?) mais tout de même, elle a encore ses aficionados, ses fans, ses inconditionnels.

Mais avant d'en arriver à des gloires internationales comme Mohammed Ali et autres Joe Louis, Sugar Ray Robinson ou encore le terrible Mike Tyson , ce sports aux règles désormais très strictes et bien fixées en était encore à ses vrais débuts du vivant de Jack London.

Il n'aura par ailleurs pas échappé à l'amateur de cet écrivain souvent physique, tant dans l'écriture que dans les aventures qu'il conta pour notre plus grand plaisir de lecture, quelques seize années, qu'elles fussent du Grand Nord sauvage ou de l'affrontement contre l'élément marin, fut un sportif convaincu et émérite, bien que parfaitement amateur - au sens le plus noble du terme -, ne négligeant son corps que par la faute de la maladie (et, il faut bien l'avouer, de ses nombreux excès, principalement alcooliques) et de ses multiples dépressions. Mais jusqu'au bout, il tâchera d'entretenir ce corps souffrant. La pratique de la boxe en sera l'un des nombreux moyens. La voile demeurera l'une de ses principales passions jusqu'en ses dernières heures.

C'est donc assez naturellement que la plume nerveuse et précise de l'auteur californien devait se prêter à ce jeu du commentaire journalistique et même, à de multiples reprises, du grand reportage. On ne peut que songer, évidemment, à son immersion totale, quatre mois durant, dans a Londres des bas-fonds, d'où surgira l'un des témoignages parmi les plus frappant de l'époque, consacré à la misère des grandes villes industrielles : le peuple de l'abîme.

Il y eut aussi ses reportages consacrés aux grands bouleversements géopolitiques de son temps, son voyage suivit d'articles sur la guerre russo-japonaise en Corée, d'abord. La révolution mexicaine puis les implications étasuniennes de cette guerre civile ensuite.

N'oublions pas, non plus, son témoignage de première main sur la vie des "trimardeurs" dont il vécu l'existence, six mois durant, et qui lui fit rédiger son étonnant : Les vagabonds du rail.
Enfin, bien que dans un genre autobiographique un peu différent, il y a son célèbre journal de bord dans lequel il raconta les péripéties de la côte californienne jusqu'en Australie et qu'il vécu en compagnie de son épouse Charmian à bord du voilier qu'il avait lui-même intégralement conçu : La croisière du Snark.

Aussi est-ce parfaitement naturellement que l'on retrouve notre écrivain à la rédaction d'articles de presse, plus ou moins longs, plus ou moins aboutis, nous contant avec vigueur tel match de boxe, faisant de l'une de ces rencontres le premier "match du siècle" probable de toute l'histoire du pugilat moderne - la rencontre entre les deux champions invaincus de l'époque, Jim J. Jeffries versus Jack Johnson, dont l'intérêt pour l'histoire valu surtout pour ses à-côtés plutôt que pour le match lui-même, Johnson étant le premier grand champion noir-américain dans une Amérique blanche, "WASP", et terriblement raciste. La victoire, sans grande difficulté, de Johnson provoqua même de telles échauffourées le lendemain de la rencontre que treize personnes y périrent !-. Et si London pouvait se révéler par ailleurs à peu près aussi raciste que ses contemporains (malheureusement), il n'en demeure pas moins qu'il reconnu, ce jour-là comme lors d'un match précédent, la supériorité incontestable et la classe inouïe -et sans doute pour longtemps, de son propre aveu- de ce combattant. Ce qui ne fut donc pas le cas de tout le monde... Quoi qu'il en soit, même dans un genre moins glorieux que la Littérature, London sut être un précurseur, reconnu comme tel par les futurs grands reporters et journalistes sportifs de la génération suivante.

Après la boxe, c'est à la voile -et, véritablement, littéralement, la voile, non simplement la navigation, l'apparition de petits bateaux fonctionnant à vapeur et même, déjà, avec des moteurs à explosion, entament son lent processus de transformation de la société, y compris dans ses loisirs - dont il nous fait un panégyrique que l'on peut qualifier d'amoureux !

Le surf, qu'il découvrira lors de sa croisière avec le Snark, allait valoir quelques pages d'une rare élégance et d'un véritable et sincère coup de coeur de la part de cet homme qui, d'ailleurs, ne mentait jamais sur ses préférences ou sur ses dégoûts. Ainsi, cet homme qui admirait le combat entre deux êtres humains avait-il en abomination la corrida qu'il jugeait parfaitement innommable et barbare.

Mais c'est d'un tout autre sport dont il nous gratifie en fin de volume, pur travail de commande, mais assez amusant et instructif à lire, en fin de compte : un championnat national de tir à la carabine organisé à San Francisco en 1901. On sent que Jack est aussi peu connaisseur de ce sport qu'il a envie de bien faire (et, en bon pigiste ayant besoin de vivre car en début de carrière, parfaitement capable de tirer à la ligne sans trop ennuyer son lecteur). C'est donc relativement amusé que nous suivons ces tireurs d'un autre temps, presque tous d'origine germanique, presque tous les dignes héritiers des "freischütz" que l'on rencontre encore en Bavière ou en Suisse. Cela donne à ces dernières pages une couleur pour ainsi dire exotique et décalée.

Ces textes, réunis pour la forme car très souvent éclatés dans des publications aujourd'hui épuisées ou en complément de textes plus essentiels composent ainsi un petit ouvrage probablement anecdotique et pas absolument indispensable mais très réjouissant, autant qu'il offre une facette méconnu bien qu'importante de notre fameux Jack London.
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