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Critique de CDemassieux




Je me souviens d'une chanson de Renaud – « Miss Maggie » – qui disait entre autres ceci : « Un génocide c'est masculin / Comme un SS, un torero. »

Ce livre lui donne tort, qui raconte le destin de femmes, dont certaines, prises dans l'euphorie de la toute-puissance nazie, ont été jusqu'à attirer des enfants pour leur fracasser la tête contre un mur ; lâcher des chiens qui les ont dévorés, et j'en passe. La plupart de ces femmes n'ont pas été condamnées après-guerre, telle Johanna Altvater, qui attirait des enfants juifs avec des bonbons pour leur tirer ensuite une balle dans la bouche. L'immonde Merah, aurait adoré, lui qui a imité ce geste en 2012 dans une école confessionnelle juive...

Le travail de recherche considérable de Wendy Lower nous confronte ainsi à une réalité que nos préjugés sociétaux ont encore aujourd'hui beaucoup de mal à admettre, à savoir que la femme est potentiellement l'égale de l'homme en matière de cruauté : « Accoutumés que nous sommes à penser le meurtre, la guerre et le génocide comme des activités masculines, nous demeurons ignorants, en l'absence de preuves contraires, de l'ampleur de la participation des femmes à ces mêmes activités pendant la guerre », explique l'auteur.

Ainsi, « on s'attendait à ce que la masse des Allemands portant l'uniforme et le cheveu ras, soldats ou policiers, en vînt à tuer – mais les femmes ? Comment des femmes pouvaient-elles agir ainsi ? Qu'une figure apparemment maternelle et douce pût s'adonner aux tendres consolations et, l'instant d'après, faire du mal ou même tuer représentait et représente toujours l'un des aspects les plus problématiques du comportement des femmes dans cette période de l'histoire ». Parce que certaines pratiquaient le massacre de Juifs alors qu'elles étaient… enceintes.
Ces femmes, jeunes pour la plupart, qui sévirent dans l'Est occupé de l'Europe, étaient infirmières, secrétaires, gardiennes de camps, épouses de SS. Elles avaient été fanatisées par des années de conditionnement idéologique, « convaincues que la violence de leurs actes trouvait sa justification dans le châtiment vengeur des ennemis du Reich ».

Et, confrontées à la Solution finale, chacune d'elles agit selon sa conscience et, si je puis dire, ses prédispositions morales : « L'éventail des comportements allait d'une extrême à l'autre, du secours au meurtre. » Et l'auteur de préciser toutefois : « Mais le nombre de celles qui prirent part, d'une façon ou d'un autre, au meurtre de masse est infiniment plus élevé que le nombre de celles qui tentèrent de s'y opposer » ; ces dernières considérées comme traîtresses et exécutées. Les autres pouvaient aller jusqu'à éprouver un « sentiment d'euphorie qui s'exprimait dans le sexe et la violence ». Pour beaucoup de ces femmes, elles vivaient une aventure exotique exaltante.

Si « de nombreuses Allemandes eurent affaire à la Solution finale, et aux diverses étapes de sa mise en oeuvre », certaines allèrent jusqu'à accomplir des tâches « annexes » sans broncher, comme euthanasier des soldats Allemands gravement blessés au front ; car, selon l'idéologie détraquée nazie, ils devenaient des poids morts.

Wendy Lower dresse un portrait juste, le plus dépassionné possible – ce qui est une gageure ! –, de ces femmes, dont beaucoup moururent paisiblement, certaines même convaincues, longtemps après les massacres auxquels elles participèrent avec entrain, de leur bien-fondé. Ainsi va la nature humaine…








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