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Critique de ElGatoMalo


"J'étais, je dois le reconnaître, bien mal préparé à parcourir le dédale de telles arguties. Pour ma part, et ce jusque dans ma Copenhague occupée, je n'avais jamais voulu croire que l'on puisse s'intéresser de près ou de loin à mes faits et gestes."
Ces deux phrases empruntées à la fin de la page 104 et au début de la page 105, résument assez bien mon état d'esprit au moment où il ne me reste plus que 24 heures pour rédiger mon billet sur ce livre sans vraiment dire tout l'embarras où je me trouve devant le manque d'enthousiasme à progresser dans cet ouvrage qui a pourtant toutes les qualités éditoriales dont on pourrait rêver : le format, la mise en page, la taille des caractère, et ce serait un vrai plaisir à lire si, comment dire ? l'auteur ne donnait pas l'impression qu'il ne le retardait délibérément pour plus l'augmenter (le plaisir). Il en arrive à diluer sur plus de quatre-vingt pages les motivations libidineuses et autres stratégies de séduction d'un majordome sur une gouvernante italienne nouvellement embauchée, ce qui relève de l'exploit. Pour s'aider un peu, il utilise le name dropping le plus complet sur les physiciens des années trente. Tout le monde y passe de Majorana à Lise Meitner (le bureau "vide" de Lise Meitner, il ne faut exagérer non plus), en passant par Bohr, von Braun et bien sûr : Heisenberg dont on peut se demander ce qu'il vient faire là, habillé en odieux promoteur du nazisme alors qu'en fait l'original, porte-parole des théories d'Einstein, a eu beaucoup de mal avec les autorités racistes de l'époque qui l'accusaient d'être surtout le "promoteur de la science juive". Et quel éblouissant Heisenberg ! Lui qui n'aura pas été fichu de mettre au point la bombe atomique (par manque de moyens financiers, paraît-il), ni même un réacteur atomique pour ses contemporains, mais qui, là, dans cette uchronie, est capable de fabriquer un "tesseract", un bidule qui ouvre des portes sur une autre dimension. Et quel inconscient cet Heisenberg qui confie la clef de cette dimension où les nazis développent leur programme militaro-scientifique à un vague collègue (Niels Bohr, quand même) qui n'a pas la même nationalité que lui. On a un peu passé les bornes de l'inconscience, c'est carrément de la haute trahison. Mais c'est sans conséquence parce que dans l'uchronie en question il est clair que les scientifiques de haut niveau sont de parfaites nouilles en matière de politique internationale, de stratégie militaire et d'espionnage. Plutôt que d'envoyer l'objet aux autorités suédoises pour qu'elles prennent conscience de la gravité du danger (grâce à l'objet, le bonhomme a pu assister discrètement à une conférence qui lui a permis juger des avancées techniques effarantes dans la dimension nazie), il n'a pas d'autre idée que de le confier à son majordome pour qu'il le mette "à la poubelle", comme c'est crédible ! Aussi crédible que la méthode de transition entre les deux espaces qui laisse passer la conscience mais pas la matière du personnage (à la manière de Code Quantum, pour ceux qui connaissent). Quoiqu'il y ait une certaine incertitude sur ce qui peut transiter ou pas, vu que le personnage n'a pas pu circuler physiquement mais qu'une pantoufle, oui (je me demande encore comment tous les autres personnages en poste dans l'institut d'outre-dimension ont pu traverser ou même peuvent encore rentrer en Allemagne comme c'est indiqué pour un dénommé Meyer). C'est par ailleurs dans cette pantoufle que le texte rédigé à la première personne par le très bavard majordome (600 pages) sera renvoyé à la fin du bouquin, ce qui justifie le sous-titre : mémoires trouvées dans une pantoufle. Et là, je me dis que vu la taille du bouquin, ça devait être une sacrée pantoufle...

PS : Pour résumer le style est fluide, et même très lisible, mais les enjeux peu motivants pour tourner les pages (quoique... devant les deux ou trois situations un peu mystérieuses, j'en suis venu à me demander comment elles allaient être expliquées par l'auteur ce qui m'a un peu encourager à poursuivre mais pas très longtemps vu le peu de logique et l'insupportable délai avant qu'elles ne soient exposées). Et quand le héros auto-déclaré passe enfin de l'autre coté du miroir, il passe aussi du niveau de la pièce de théâtre de boulevard à celui de la New Romance voir de la Dark Romance. Il y a un public pour ce genre de chose mais il ne s'agit certainement pas des vieux bougons de soixante-cinq ans, et plus, qui ont une certaine connaissance de l'histoire des sciences, un goût prononcé pour les histoires fantastiques et de science-fiction (à condition qu'elles soient cohérentes et structurées), et là, on est bien de loin de tout ça.
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