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Critique de Mermed


Mermed
30 décembre 2022
Peut-être M. Mailer ne devrait-il pas être condamné pour avoir tenté de réduire par un assaut frontal ce que de meilleurs écrivains n'ont pas réussi à gagner par infiltration. "Les nus et les morts - l'histoire d'une bataille imaginaire dans le Pacifique - claironne sa réponse poussiéreuse à la brutalité de la guerre moderne. Sans aucun doute le roman le plus ambitieux à être écrit sur le récent conflit, c'est aussi le plus impitoyablement honnête. Même dans sa répétitivité, sa verbosité et sa suranalyse du motif, il est une performance imposante par un jeune homme de 25 ans dont les dons sont impressionnants et dont les échecs sont une question d'ambition.

Les nus et les morts est un roman extrêmement long, emporté par les eaux agitées de la désillusion, ne laissant aucune place à l'imagination. Il s'agit pratiquement d'un rapport Kinsey sur le comportement sexuel du GI. Les soldats de M. Mailer sont de vraies personnes, parlant la langue vernaculaire de l'amertume et de l'agonie humaines. Il dégage une lueur céleste assez fidèle au spectre de la bataille et expose le sang, sinon toujours les tripes, de la guerre. Pourtant, malgré toute sa virtuosité, ses canonnades émotionnelles assourdissantes, c'est avant tout une série d'escarmouches brillantes; l'objectif central n'est jamais atteint.

D'une part, nous ne savons pas exactement quel est l'objectif. M. Mailer n'aime évidemment pas la guerre, ni les gens qui combattent, mais ce n'est pas un thème original. Il s'efforce de montrer qu'une grande partie de son désagrément vient de la nature des participants, et que leur nature, à son tour, est déformée par les circonstances inévitables dans les conditions de la guerre et le climat d'une organisation militaire. Mais pas entièrement.

La génération qui a atteint l'âge adulte à la veille de la dernière guerre n'était pas idéale pour sauver le monde pour la démocratie. Il avait été gâché par la dépression. Ses minorités - deux des personnages sont juifs, un mexicain-américain - n'avaient pas encore été pleinement assimilées au rêve national. Même les groupes dominants représentaient des intérêts sectoriels et économiques concurrents. Au calme, les écarts sont réglables. A la guerre, pense M. Mailer, elles s'intensifient, car le système donne aux hommes des degrés de pouvoir sans précédent. Comment le GI - dans ses moments les moins vertueux - a obtenu ce qu'il a fait, est le sujet de ce roman.

La bataille est vue à travers les yeux d'un seul peloton, plus un major et un général. . Unité combattante, les hommes sont un ensemble d'individus. Chacun est étudié, dans des flashbacks écrits avec précision, comme le produit d'un certain environnement. S'il y a le moindre doute que M. Mailer est un écrivain perspicace et habile, ces vignettes le dissiperont. En revanche, le récit principal est souvent lent ; trop d'ennui de la guerre est traduit littéralement ; le lien entre le passé des personnages et leur existence au combat est parfois mince. de plus, le général, dont dépend une si grande partie de la motivation de l'histoire, est clairement une version sur-intellectualisée d'un fasciste, ni convaincante ni typique.

Ce sont des défauts, mais ils enlèvent peu à la puissance globale du livre. La scène dans laquelle Gallagher continue de recevoir des lettres de sa femme décédée - écrites avant qu'elle ne meure en couches mais livrées pendant un mois après qu'il en ait été informé; la mort de Wilson, parmi les plus prenantes de toute la littérature de guerre ; l'effort inutile et sadique de la part du sergent de peloton. Crofts pour amener ses hommes à escalader une montagne - ce sont des moments qui touchent profondément le coeur de la guerre. Ils sont un triomphe du réalisme, mais sans la compassion qui donne l'autorité finale dans le domaine de la conduite humaine.

Les nus et les morts n'est pas un grand livre, mais il témoigne incontestablement d'un talent nouveau (à l'époque de sa parution) et significatif chez les romanciers américains.

Lien : http://holophernes.over-blog..
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