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Critique de SZRAMOWO


Roman, polar, docu fiction, Sombre sentier est un recit a part, haletant, prenant, dont on ne sort pas indemne.
Des personnages border-line, Dacquin le commissaire bi-sexuel, ses adjoins, Attali et Romero, Thomas et Santoni des ripoux « malgre eux » qui se payent sur la bete « Romero s'appuie contre elle de tout son poids, defait sa braguette d'une main, releve la jupe. Grognements de plaisir. »
« Attends, autant en profiter. Fais moi jouir entre tes seins. Et Santoni defait son pantalon debout devant la porte. »
L'histoire est credible. le Sentier a Paris dans les annees 1980, la revolte des clandestins turcs dans les ateliers de confection. Les citations de Liberation sur ces evenements, comme le mentionne l'avertissement en debut de roman, sont reelles.
L'imagination de Manotti fait le reste.
Imagination ou clairvoyance, le lecteur hesite tout au long de la lecture.
Le recit prend la forme d'un agenda qui deroule les evenements jour apres jour heure apres heure.
Trafics en tous genres, drogue, prostitution, vente de certificats de sejour, passe-droits, complaisance.
Le fil rouge qui traverse le roman repose sur l'analyse que nous livre Bourdieu dans son essai La misere du monde.
En resume : Lorsque l'Etat abandonne la gestion des dispositifs de controle social a l'initiative des agents qu'il est cense encadrer, conseiller, diriger ; reduit leurs moyens de facon drastique, ces agents confrontes a des situations qu'ils ne maitrisent plus, sont capables du meilleur comme du pire.
Les personnages du roman se debattent dans cette problematique, en tentant d'imposer une logique que sous tend leur conception personnelle du bien et du mal.
Guerre des personnages, guerre des services, guerre des polices, conflits de generations, entre Meillant l'ancien resistant entre dans la police pour faire valoir les ideaux du CNR mais, qui peu a peu s'en eloigne en considerant qu'il detient toujours la verite et Dacquin devenu commissaire a 26 ans apres avoir brillamment passe le concours lui delivrant ce titre.
Experience contre titre universitaire, tradition contre iconoclastie. Il n'y aura ni vainqueur ni vaincu.
La raison d'Etat avec un grand R et un grand E s'impose.
Une logique de cercles concentriques. Au milieu le noyau dur, noir comme l'enfer, dans lequel s'agitent les flics, et plus on s'eloigne plus la couleur palit sans jamais donner autre chose qu'un blanc sale qui satisfait politiciens, entrerpeneurs et opportunistes de tous bords.
Dacquin lui, continue de voir le noir qui pervertit l'ensemble du coprs social. Escorts de haut vol, clubs echangistes, consommation assumee de cocaine, et autres substances, contrats mirifiques arraches de facon douteuse, diplomates complices...sont a l'extreme peripherie de ce contre quoi il combat tous les jours.
Un catalogue qui ressemble a s'y meprendre a notre actualite.
« Ce matin, j'ai eu un coup de telephone du directeur du cabinet du ministre. Hier, un de vos inspecteurs a contacte deux deputes, pour leur demander un entretien...
- Oui, l'inspecteur Attali sur mes ordres.
- Bien. Mais les ordres du ministre, eux, sont clairs : on laisse tomber les deputes. Vous n'avez rien de solide contre eux...Et ca liberera des forces que vous pourrez concentrer sur la filiere turque. »

A lire absolument.
Au passage, un clin d'oeil a Simenon : page 103, « le juge d'instruction, un denomme Parent, aujourd'hui a la retraite a Meung-sur-Loire, a prononce un non-lieu... »

Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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