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Critique de MarianneL


Printemps 1980 : Les travailleurs de la confection du Sentier, essentiellement turcs, se sont mis en grève de la faim pour obtenir des papiers, ce qui va conduire à la première manifestation d'envergure pour obtenir des régularisations de travailleurs clandestins.

«Il raconte la clandestinité, se déguiser en touriste avec un appareil photo en bandoulière ; la peur qu'il faut surmonter quand on voit un flic dans la rue, continuer à marcher, les fouilles, les nuits dans les postes de police, les arrêtés d'expulsion. Termine. Nous ne voulons plus. Nous sommes ici, nous travaillons, nous voulons carte de séjour, carte de travail. La dignité.»

Dans le même quartier, le commissaire Daquin et ses hommes de la brigade des stupéfiants enquêtent, avec des méthodes brutales, souvent au-delà des limites de la légalité, sur un réseau turc de trafic d'héroïne. Dans un contexte international mouvementé, avec l'arrivée au pouvoir de Khomeini en Iran, l'intervention de l'URSS en Afghanistan et les soutiens locaux des Etats-Unis aux trafiquants, les routes internationales du trafic de drogue sont remaniées, et l'héroïne maintenant en provenance d'Iran, du Pakistan ou d'Afghanistan, beaucoup plus pure que celle en provenance d'Amérique Latine, cause de très nombreux décès par overdoses en Europe.

Avec la découverte du cadavre d'une adolescente thaïlandaise, et grâce à Soleiman, indicateur turc et amant de Daquin, qui va prendre la tête du mouvement des sans-papiers, l'enquête va mener la police sur des terrains glissants, croisant le marais des intérêts français au Moyen-Orient, des réseaux de prostitution et de pédophilie, des trafics, fraudes fiscales et corruption en tous genres, mettant en cause des politiques et des hommes d'affaires influents.

Publié en 1995 aux éditions du Seuil, ce premier roman de Dominique Manotti, qui fut partie prenante dans cette lutte des sans-papiers en tant que syndicaliste, fut aussi son premier coup de maître. Dans un milieu masculin, violent et extrêmement réaliste, où les frontières entre crime et police sont toujours incertaines, «Sombre sentier» s'inscrit dans une réalité politique et sociale toujours très pertinente, avec un rythme qui ne se relâche jamais.

«-Vous connaissez un peu le milieu professionnel du Sentier ?
-Absolument pas. Depuis trois ans, je suis à la Financière, et je travaille sur les délits d'initiés à la Bourse. Ma présence ici, si j'ai bien compris, est le résultat d'un compromis dans les hautes sphères. Les uns veulent absolument qu'on assainisse le Sentier, pour ne pas laisser le terrain complètement libre à ceux qui réclament la régularisation des clandestins. Les autres pensent que c'est de la foutaise, et qu'il faut laisser tourner un secteur qui marche bien, et qui ne pourrait pas le faire sans clandestins. Alors, ils se sont mis d'accord pour designer quelqu'un, mais ils ont pris un jeunot naïf, qui n'y connaît rien, et qui a donc toute chance de se noyer. Voilà. C'est moi.
-Et vous, vous pensez quoi de cette affaire ?
-Moi, je suis là pour trouver, c'est la façon dont je considère mon métier de flic, et je peux vous dire que je vais me déchirer la gueule pour sortir quelque chose de ce merdier.
-Vous parlez curieusement, pour un costard-cravate.
-Je n'ai pas toujours été costard-cravate.
-Ah bon ? Et que faisiez-vous avant la Financière ?
-J'étais loubard.»
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