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Critique de Slava


Slava
21 décembre 2020
Bien que la série Game of Throne se soit achevé, la saga de G.R.R Martin n'a pas fini de quitter notre imaginaire de sitôt. Il y a bien sûr le sixième tome que les fans attendent depuis longtemps mais surtout la venue prochaine du spin-off, House of the Dragons, qui se base sur les exploits des Targaryens des siècles avant l'histoire principale. En attendant 2022, on peut lire le livre qui va servir pour l'adaptation et écrit par le même auteur que la chanson de la glace et du feu, Feu et Sang, qui retrace l'histoire de cette sulfureuse famille de dragonnier et des péripéties de Westeros bien avant la guerre des cinq rois et des aventures de Jon Snow, Arya Stark ou de Daenerys.
Feu et Sang a la particularité d'être surtout une chronique historique, donc loin du roman narratif à plusieurs voix habituellement. Une chronique centré sur les guerres, les paix, les alliances, les trahisons et d'autres événement qu'agitent les Sept Royaumes mais surtout la dynastie qui les régentent avec plus ou moins de succès : les Targaryens, descendants des illustres Valyriens, reconnus pour leur morphotype singulier de blonds aux yeux violets, qui pratiquent l'inceste et chevauchent les bêtes prodigieuses que sont les dragons. Tout cela raconté par Mestre Gydaln qui retrace les origines et les faits d'armes de la famille d'un oeil détaché et formel, bien que ses opinions légérement rétrogades ne soient guère cachés. de plus, bien qu'il soit à la plume, il se base lui aussi sur des sources disparates, de témoignages et autres écrits qu'il à a la main, très vastes et divers et qui proposent pas toujours la même version sur tel ou tel épisode, ce qui fait que beaucoup des passages dans la chronique sont incertaines et que c'est au lecteur de décider au bon ce qui lui semble quelle est la bonne version. Une idée ingénieuse de G.R.R Martin qui s'approche de nos études historiques ou là encore l'interprétations des sources diverses et variées sur le passé dépend du spécialiste et du lecteur, puisqu'en définitive la vérité nous n'est pas dévoilé mais dépend de la version qu'on aura choisi.
Tout commence par la chute de Valyria aussi cataclysmique et la fuite des Targaryens vers Peyredragon qui deviendra leur fief natal iconique. le clan régne tranquillement prés de la baie jusqu'à ce que l'un de leurs rejetons, le jeune fougueux Aegon décide de conquérir tout le continent, aidé par ses soeurs-épouses Rhaenys la douce et Visenya la dure et de leurs trois dragons, Balerion, Meraxés et Vhagar. Ils y parviendront sans trop sourciller (ou presque) et nous verrons par la suite au cours de la chronique leur vie aprés la Conquête et celles de leurs descendants qui seront bien animés tout comme celles des autres maisons nobles dont nous connaissons bien dans la saga, les Stark, Lannister, Baratheon, Arryn, Tully et autres.
La première partie raconte la Conquête du continent et la formation des Sept Royaumes, avec la soumission des territoire au grand Aegon (sauf Dornequi résiste toujours et irrésistiblement à l'envahisseur et qui continuera de l'être encore un temps, ses habitants descendant des Rhoynar qui ont fui l'oppression de Valyriens jadis) qui contient son lot de batailles, de ruses et rebondissement, racontant notamment entre autres la naissance de la maison des Baratheon dont on découvre qu'ils ont été bien plus proche des Targaryen qu'on ne le croit ou encore la construction du fameux trône de fer qui devient l'incarnation de la royauté Cela ensuit ensuite sur le règne des fils du Dragon, Aenys l'indécis puis le cruel Maegor et ses six femmes, et puis sur le conciliateur et meilleur roi de Westeros, Jahaerys qui modernise les contrées. C'est d'abord le temps de l'édification du pouvoir royal et ensuite des premières révoltes et abus qui en découlent, avec notamment le conflit opposant Maegor avec la Foi Militante qui apporte bien des ennuis à celui qui devient un tyran sanguinaire qui décapite ceux qui le contreviennent, terrorisant les royaumes aux alentours. Puis l'accalmie et la prospérité non sans sacrifice qui vient avec Jahaerys réparant les erreurs de ses aïeux, améliorant graduellement tous les domaines de l'heptachie et notamment de la vie de ses sujets, un règne heureux qui connaît des troubles entre un début difficile et les complications qu'apportent les nombreux enfants du roi. Une partie mosaïque sur les aventures qui s'y passent, avec l'adaptation lente mais réussite d'une dynastie à un continent éloigné de leurs coutumes et de leurs traditions, plus basés sur la foi des Sept que sur Valyria.
La seconde partie est bien plus percutante et ardent : après un début calme et paisible avec le règne du successeur de Jahaerys, son petit-fils Viserys, vient la tempête et l'enfer avec la Danse des Dragons, un conflit civil qui ravage les Sept Royaumes et opposant deux branches des Targaryens qui s'affrontent pour le trône, entre les Noirs soutenant Rhaenyra fille d'un premier lit du défunt roi unie à son indiscipliné oncle Daemon, et les Verts soutenant Aegon fils de la seconde épouse de Viserys, Alicent Hightower, une lutte sauvage qui ensanglante Westeros. C'est de cette guerre que sera le théâtre notamment du prochain spin-off, autant dire que ce morceau là vaut à lire surtout, avec ses coups de forces, ses fourberies et ses tourments suscités par les basses émotions humaines, avec des horreurs qui dépassent l'entendement comme l'incident de Sang et Fromage, le massacre de Chutebourg ou le sac de Fossedragon. Lequel des deux camps va remporter la bataille ? Je n'en dirais pas plus mais sachez que si la guerre se termine bien et que la chronique se finit par le successeur d'un des deux puissants, la victoire obtenu est amère et les conséquences de la boucherie se font bien sentir sur le destin des Sept Royaumes.
La chronique nous offre un monde en mutation, chamboulé par les Targaryens au caractère enflammé. Un monde cloisonné dans un féodalisme réaliste aux valeurs bien rudes ou les corps saignent au combat, ou les femmes sont mariées à un jeune âge et susceptible de mourir en couche mais qui baigne de magie avec la présence majestueuse des dragons, qui volent là ou ils peuvent et accompagnent leurs maîtres dont ils s'identifient : on voit bien des liens très proches noués entre un dragon et un Targaryen, comme Songefeu dragon de la princesse Rhaena puis ensuite d'Helaena mais aussi des dragons entre eux, ainsi l'émouvant duo de Vermithor dragon du roi Jaehaerys et d'Aile d'Argent dragonne de la reine Alysanne qui à l'instar du couple se chérissent l'un et l'autre et combattent ensemble les épreuves qui les accablent. Mais ce monde change radicalement avec la Danse des Dragons qui décime une partie des dragons et on présage la fin de cette espèce qui ne se relèvera de ses cendres qu'avec la future Daenerys l'Imbrulée. Un monde ou les questions de la religion, du droit des femmes et des faibles sont loin d'être inexistant et se reflétant à nos propres préoccupations contemporaines. Les forts règnent certes mais peuvent être détrônés par les plus démunis qui peuvent bien atteindre le trône.
G.R.R Martin s'amuse à nous donner des jeux de miroir et de clin d'oeil aussi à sa série littéraire dans Feu et Sang et ils sont nombreux : entre le rabelaisien bouffon nain Champignon qui en rappelle un nabot bien connu, la régence d'Alaric Stark à Port-Réal qui renvoie au tragique poste de son lointain descendant Ned Stark qui aurait mieux de s'inspirer de son ancêtre, le sanguinaire Maegor dont les exactions sont digne de Joffrey où encore les affres de Rhaenyra semblables à ceux de Cersei, ils sont bien nombreux oui. Tout comme les inspirations historiques qui en découlent pour les passionnés de l'Histoire, la Conquête d'Aegon ressemblant à celui du normand Guillaume envahissant l'Angleterre saxonne, l'avènement de la famille lysienne des Rogare qui rappelle à celle des Medicis de Florence où encore le régne de Jahaerys et d'Alysanne qui est celui fantasmé et arrangé d'Henri II et de son épouse Aliénor d'Aquitaine. Une façon de nous signaler que notre Histoire est souvent plus romanesque aussi que la fiction.
La chronique nous est servie aussi par de magnifiques illustrations en noir et blanc, qui regorge de détails et qui nous fait vivre les rois et reines ainsi que leurs prodiges entre les pages.
Evidemment, cela peut dérouter le manque de narrateurs multiples comme on est habitué dans la saga et le style de Mestre Gydaln apparait souvent comme austère, avec quelques longueurs. Mais Feu et Sang est un excellent ouvrage à consulter d'urgence pour les fans de Game of Throne ou pour tout amateur de fantasy !
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