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Critique de pierre_cocquempot


Ibn Khaldûn, de son nom entier ‘Abd al-Rahmân b. Muhammad B. Haldun, naît en 1332 à Tunis dans une famille andalouse d'origine arabe yéménite, longtemps établie à Séville avant de fuir la « Reconquista » chrétienne, qui compte des bourgeois lettrés, des hauts fonctionnaires ou politiques. Il commence ses études à Tunis à la cour des Mérinides et développe une culture savante et commence à réfléchir sur l'adéquation des systèmes de la pensée et des structures du réel. Lorsqu'il perd sa famille, après une peste qui ravage l'Ifriqiya, Ibn Khaldûn devient conseiller, secrétaire, ambassadeur ou encore ministre auprès de différents souverains grâce à sa formation solide. de 1350 à 1372, il est au service de plusieurs dynasties d'Espagne ou du Maghreb. En parallèle, il mène une activité secrète et d'intrigues car il a l'ambition d'acquérir plus de pouvoir pour jouer un rôle à sa mesure. Durant sa carrière politico-administrative, il rencontre Tamerlan, à Damas en Syrie, qui fait trembler toutes les civilisations de l'Ancien Monde. Il est délégué auprès du conquérant turco-mongol pour négocier la paix, et ce dernier prend conscience des aptitudes et du savoir d'Ibn Khaldûn et tente de l'engager dans sa cour. Ibn Khaldûn refuse et, en conséquence de ce refus, Damas est pillé. Lassé des complots et des polémiques qui gravitent autour de lui, Ibn Khaldûn décide de se retirer en 1372 dans la forteresse d'Ibn Salāma en Oranie. Dans son refuge, il construit en quatre ans l'ouvrage qui va fonder sa gloire : la Muqaddima, prolégomènes à la volumineuse histoire universelle, le Kitâb al-‘Ibâr (1375-1379). Il vit ses derniers jours au Caire à partir de 1382, où il enseigne ses connaissances et occupe une chaire de droit dans l'université d'Al-Azhar, la plus grande université du monde musulman. Il trouve la mort au Caire, en 1406. Il est aujourd'hui reconnu comme le plus grand historien du Moyen ge et de l'Islam et comme le seul grand philosophe de l'histoire qui ne soit pas européen. À proprement parler, Ibn Khaldûn n'est pas un géographe mais son étude et ses idées se rapprochent de la discipline qu'est la géographie.

C'est dans la Muqaddima, qu'Ibn Khaldûn développe avec éclat ses principes de travail, fondés sur la rationalité, sur l'étude critique des sources et sur le fait de ne pas être idéologique en dépassant les intérêts politiques ou économiques de son époque. Dans cet ouvrage, Ibn Khaldûn devait initialement centrer son étude sur l'histoire des Berbères, mais finalement il décide d'écrire une histoire universelle. Il centre son attention plus particulièrement sur la civilisation arabo-musulmane pour développer sa théorie, mais elle est aussi valable pour une grande partie des peuples de l'époque médiévale de l'Ancien Monde. Il met en place une démarche d'analyse des civilisations que l'on peut définir comme holistique, c'est-à-dire que sa doctrine considère les objets et les concepts comme appartenant à un système. Il établit un lien entre le récit politique, l'évolution des forces sociales, les productions économiques et culturelles. de plus, son objectif est de comprendre la science de la civilisation, ce qu'il nomme l'umr an, s'interroge constamment sur les causes des transformations historiques. Pour lui, les sociétés humaines sont réparties en deux groupes : les sédentaires et les nomades qui interagissent par effet de miroir. En effet, Ibn Khaldûn a une vision cyclique de l'histoire, pour lui, chaque peuple nomade, dont l'une des caractéristiques est la force de conquête (‘asabiya), est voué à prendre les possessions du peuple sédentaire vaincu, dont l'une des caractéristiques est la mollesse d'esprit.

Pour étudier les idées d'Ibn Khaldûn, plusieurs ouvrages sont disponibles, dont ce court essai de Gabriel Martinez-Gros. Dans son livre, il nous montre la justesse de la théorie historique d'Ibn Khaldûn qui tend à expliquer le fonctionnement de toutes les entités impériales au travers des siècles. L'historien expose son ambition d'écrire, en prenant appuie sur les concepts posés par Ibn Khaldûn, une histoire du monde allant des Perses Sassanides à la Compagnie britannique des Indes Orientales, tout en passant par la Rome impériale, la Chine, l'Islam médiéval, les steppes mongoles ou encore l'Inde des Moghols. Gabriel Martinez-Gros aborde les questions de la violence, de la paix, de la productivité et des autres concepts qui relèvent du système de l'empire. Il s'intéresse à l'évolution de l'humanité et des empires à travers la grille de lecture offerte par Ibn Khaldûn. L'objectif de l'ouvrage est de saisir les orientations majeures des empires comme appartenant à un système dit impérial, au sein duquel, plusieurs facteurs de naissance, de sédentarisation et de disparition sont observables. La théorie d'Ibn Khaldûn, appliqué à cette brève histoire des empires, à l'ambition de comprendre plus facilement l'explication de l'histoire.
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