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Critique de ktylauney


Le narrateur revient à la maison de Chêne-Bleu située dans le Loir-et-Cher.
Ici coule une rivière qu'il regarde par la fenêtre de la chambre du premier étage. En même temps qu'il contemple la statue de bois à qui il se confie, posée sur son chevet.
Lui revient aussi en mémoire " L'Aurore ", une sculpture de Camille Claudel, portrait enfantin qui le projette dans le passé, face à sa propre enfance, à sa recherche de l'amour maternel.
Le buste de la fillette immortalise l'enfance perdue, l'insouciance, la douceur et la sérénité que l'on égare au fil des années.

C'est aussi dans cette maison que se sont écoulés des jours heureux en compagnie d'Irmina et Anselm, des émigrés qui l'ont recueilli. Elle est Polonaise, il est Allemand. Tous deux ouvriers agricoles, qui plus est, des gens bons comme du bon pain.
L'enfant est en phase avec la nature, la rivière, les poissons, les fleurs et les nuages que l'auteur décrit merveilleusement bien.

" Des nuages courent dans le ciel assombri soudainement, ils élargissent l'immensité. Des yeux, je suis leur architecture élusive, leurs mouvements. Je m'y perds. Ils s'ajoutent les uns aux autres, se recomposent, se détachent. J'aime leur enchevêtrement, l'aléatoire qui les guide, ce hasard qui les assemble, les sépare, les réunit à nouveau. Comment résister aux formes d'une séduction facile, nées d'un tumulte accidentel ? " ( Citation )

" C'est ainsi que j'entrai en contact direct avec la nature, habité par un sentiment d'être primitif, persuadé que l'absence de parents était une chose positive. Et j'ai grandi avec le sentiment d'être mon propre enfant. Sans me poser de questions, j'ai habité la vie, vêtu de cette solitude que j'ai tout de suite adoptée. Plus tard, j'apprendrai qu'il n'y a de solitude que dans l'attente. " ( Citation )

Car c'est aussi le roman de l'attente, de la solitude, des interrogations. Pourquoi sa mère biologique l'a t-elle laissé ? Pourquoi chacun entretient le mystère et garde le silence à propos de son père ? Qui est-il ? Est-il vivant ou mort ?
Le narrateur grandit avec ces questions qui resteront longtemps sans réponses.
Il vit heureux jusqu'à sept ans, et puis un beau jour on vient l'arracher des bras de ses parents nourriciers pour l'emmener à la ville.

Le narrateur se découvre alors une passion et une échappatoire dans l'art.
Il garde en lui des blessures profondes à cause d'une mère qui ne lui a jamais prodigué la moindre tendresse et d'un père inconnu qui a disparu de la circulation. Ce père autour duquel gravite son questionnement.

" J'avais envie de savoir. Tout. Je voulais savoir, même s'il arrive un temps où l'on n'a plus envie d'être l'enfant de quelqu'un. " ( Citation )

" L'eau qui passe " est un excellent livre où chante tellement la poésie des mots sur fond de nature ensauvagée que la beauté des lieux se matérialise à nos yeux.
Et le temps s'écoule, au même rythme que l'eau de la rivière, charriant les non-dits, les souvenirs, exacerbant la colère et la souffrance intérieure, rouvrant les plaies, pour ne laisser que solitude et nostalgie à ce petit garçon devenu grand.

Franck Maubert signe dans un style classique une oeuvre magnifique avec des phrases émouvantes, des descriptions poétiques et théâtrales empreintes de mélancolie qui ne peuvent que nous marquer et s'imprimer en nous.









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