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Critique de la_plume_francophone


Il est de ces femmes qui inspirent,
une lecture d'Aux citoyennes de Paris de Louise Michel

Il est de ces femmes qui nous inspirent, depuis toujours et particulièrement en cette période, et je remercie Babelio de m'avoir fait parvenir Aux citoyennes de Paris de Louise Michel dans le cadre de l'opération masse critique, un recueil de textes très divers (manifestes, discours proférés, extraits d'essais, poèmes, conventions rédigées) réunis, en 2016, par les Carnets de l'Herne.
Les points communs de tous ces textes sont à l'évidence l'incroyable engagement de cette femme, icône de la Commune de Paris, fille des Lumières et du Romantisme, préoccupée, entre autres, par le sort des femmes, les questions de pédagogie et l'action anticoloniale lors de son exil en Nouvelle-Calédonie de 1872 à 1880, comme le rappelle François l'Yvonnet dans l'avant-propos. Ce sont ces engagements que l'on verra ainsi se succéder dans les textes rassemblés, à l'exception de l'anticolonialisme puisqu'un ouvrage coordonné par Emilie Cappella (Louise Michel, exil en Nouvelle-Calédonie, Magellan & Cie, 2005) rassemble déjà les textes qui y ont trait, ainsi que ceux qui abordent sa découverte de l'idéal anarchiste.
Mais l'unité du recueil n'est pas que thématique. Des traits stylistiques récurrents mettent à jour une forme de lyrisme progressiste et militant. Ce dernier passe d'abord par la construction d'un ethos authentique, singulier et unique : « seule, je tenais tête à l'ennemi » (p. 11), aux accents prophétiques : « Plus on aura pesé sur les misérables, plus la révolte sera terrible » (p. 21) ; tant la locutrice ne doute à aucun moment de son pouvoir sur autrui : « je prends la Présidence de la République » (p. 12). Les métaphores du cadavre en décomposition ou de la dépouille moribonde pour évoquer la vieille société sur le déclin, tout comme celle du renouveau printanier ou des semences pour évoquer le monde qu'elle appelle de ses voeux, sont aussi des images constantes. L'alternance du jour et de la nuit en est aussi une image très utilisée.
« La chrysalide humaine évolue : on ne fera plus rentrer ses ailes dans l'enveloppe crevée » (p. 19). Cette métaphore est d'autant plus intéressante qu'elle est plusieurs fois convoquée (voir p. 40) et traduit un processus irrémédiable. « Nul ne peut empêcher le soleil de demain de succéder à notre nuit » (p. 20). En effet, ce qui sous-tend les idéaux exposés c'est une vraie croyance dans le progrès, un progrès technique, une foi inébranlable dans le positivisme. Il est ainsi question des « prodigieuses richesses que nous donnera la science » (p. 22), d'une « science [qui] regénèr[e] le monde » (p. 47), des « merveilles » de la vapeur et de celles, « plus grandes » encore, de l'électricité (p. 42), du « progrès juste, implacable, celui qui bat en brèche les vieux récifs » (p. 46). « Allez », « allons », sont par ailleurs des exhortations très présentes, de sorte que tout concourt à présenter la pensée comme une pensée en mouvement, une pensée qui détruit, construit, et nous emporte sur son passage, nous soulève même, pour toujours plus de dignité et d'humanité.

Virginie Brinker


Lien : https://la-plume-francophone..
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