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Critique de MaudeElyther


Dans un premier temps, j'étais bien embêtée pour rédiger mon retour car ce roman n'est absolument pas ce qu'annonce la 4ème de couverture. Deux gros points m'ont déstabilisée : le genre et la place de la forêt. En effet, Kerhoded est étiqueté « fantasy », il est vrai qu'il en reprend certains codes, toutefois plus que de low fantasy, nous sommes dans un roman socio-politique et plus apparenté au post-apocalyptique qu'à la fantasy. Ce qui fait lien avec la forêt, qui, contrairement à ce qui était présenté, est peu présente.

Il faut convenir que le récit de Kerhoded n'est pas cette fantasy laissant le premier rôle à la forêt. Mais de ce fait, de quoi parle ce roman ? La Cité de Kerhoded est gouvernée par plusieurs familles bien nées, dont celle des Bélégan dont l'épouse a recueilli Réva, une enfant malade souffrant de la malédiction de son peuple, les Bégars. Les Bégars sont un peuple en exil depuis des décennies, qui a fini par s'installer à Kerhoded, où ils survivent comme des miséreux, persécutés à cause de leur croyance envers la Déesse Devâdhani et du fait qu'ils soient des émigrés.

Réva est élevée entre les principes des Bégars et au rôle de servitude magnanime auprès des Bélégan. Lorsqu'un incident diplomatique et un attentat surgissent de concert, elle est envoyée auprès du fils aîné des Bélégan, hors Kerhoded, pour éclaircir les faits et rassoir la domination de Kerhoded. En parallèle, elle accompagne également un archiviste pour déterrer des armes et des machines laissés par leur ennemie, Mauves.

La technologie mise au jour révèle un versant post-apocalyptique au texte qui se voulait de prime abord fantasy. Deux mondes s'opposent : Kerhoded, la Cité aux allures médiévales et le système des Mauves qui ont accès aux technologies (je ne précise pas volontairement). Et donc, vous demandez-vous certainement, où est la forêt dans tout ça ? Eh bien, la Forêt semble être la frontière entre ces deux mondes que tout oppose. Ou peut-être que « tout » est exagéré… Car en chemin, des ruines et des symboles interrogent grandement Réva. Et si le passé différait de ce que l'on racontait ? Les ennemis d'hier seront-ils les alliés d'aujourd'hui ?

La croyance des Bégars, la diplomatie et la protection des Bélégan, les visions de Réva, les discriminations sociales, les jeux de politique et de pouvoir, les technologies de Mauves, les guerres et conquêtes d'hier : tout cela est sur le point d'être mélangé, nuancé, redistribué. Car la forêt va remettre les pendules à l'heure, en mettant au pied du mur les esprits de conquête et de survie des personnages.

Je ne vous dirai pas comment agit la Forêt, pour ne pas spoiler. Je m'attendais à une "vraie" fantasy au travers de la forêt, qu'elle soit la voie de la quête initiatique de Réva, qu'elle fasse lien entre Réva et ses visions… mais tout cela n'est, pour moi, pas suffisamment exploité. En effet, le récit met l'accent sur l'approche socio-politique (pouvoir, trahison, obscurantisme sur le passé, castes, discrimination envers les émigrés et leur religion…), avec des personnages ambivalents qui font danser les lecteurices sur un pied puis sur l'autre du début à la fin.

Tout cela met pourtant en lumière l'écologie, car nous sommes face à deux modèles de société suite à un écroulement des décennies plus tôt. Deux modèles sommes doute radicaux et de ce fait plutôt caricaturaux, mais qui interrogent sur la recherche de pouvoir, la volonté de conquête des hommes, la technologie pour détruire, contrôler… Ici la Forêt fait figure d'un animal sauvage prédateur. En parallèle, l'autrice distille une touche spirituelle, notamment avec le personnage de Réva, parfaite frontière perméable entre les deux mondes. L'héroïne se transforme au cours du récit, face à une quête initiatique qui redéfinit bien des notions.

Avec Kerhoded, nous oscillons donc entre plusieurs genres, sans réellement nous fixer. Je sens un potentiel dans la figure de la Forêt et les visions de Réva, potentiel qui s'esquisse seulement alors que ces deux éléments auraient pu ajouter de la profondeur au récit, mais c'est ici mon goût personnel qui parle. Par ailleurs, le roman se lit facilement et se montre prenant, notamment avec ses personnages ambivalents. Selon moi, ma lecture de Kerhoded souffre réellement de la présentation éditoriale et j'ai peur qu'elle ne desserve ce roman… Certes, l'éditeur ne souhaitait sans doute pas trop en dire sur l'intrigue; j'espère que ce one-shot trouvera son public malgré cela.

Hélène Nera a autoédité un peu plus tôt cette année un roman historico-lesbien, La Femme Falaise, que je lirai avec plaisir !

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En bref : C'est malheureusement un rendez-vous presque manqué pour moi, à cause de la présentation éditoriale non fidèle au réel récit. Nous sommes dans un texte qui mélange plusieurs genres, conférant une touche de low fantasy concentrée dans la figure de la Forêt. Autrement, nous sommes davantage confrontés à une intrigue socio-politique, sous fond d'émigration, de discrimination religieuse, de pouvoir, de conquête et de contrôle. Deux mondes s'opposent, mettant en lumière l'écologie car le prédateur n'est plus l'homme… En filigrane, le personnage de Réva fait frontière entre ces mondes, via une quête initiatique. Je m'attendais à un récit tout autre, mais l'histoire a su se montrer prenante, notamment avec ses personnages ambivalents.
Lien : http://maude-elyther.over-bl..
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