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Critique de keria31


Un très bon livre instructif qui passe en revue L Histoire des pesticides. On en apprend beaucoup grâce à une enquête large et approfondie. Mais attention, le sujet est complexe et il y a beaucoup de noms d'instituts et de personnes qui y sont rattachés...Autrement dit rester attentifs car c'est une lecture assez difficile en dépit d'un phrasé simple et d'un style vivant, empreint d'humour.

D'abord ce livre revient sur les scandales les plus connus qui ont touché la France dans les années 90 jusqu'en 2005 : la sombre affaire du gaucho et du régent, 2 pesticides qui ont, entre autres, joué un rôle décisif dans le massacre des abeilles. Puis vient d'autres scandales bien moins célèbres comme ceux du chlordécone et du paraquat, 2 autres agents chimiques qui sévissent dans les Antilles françaises et qui sont considérés comme particulièrement toxiques.
Face à de telles pratiques qui se poursuivent depuis déjà plus de 50 ans, Nicolino et Veillerette nous mettent en garde en rappelant la liste des effets négatifs des pesticides sur le corps humains, souterrains et insidieux : cancers qui augmentent sans cesse depuis 40 ans, malformations congénitales et neurologiques, atteintes au système immunitaire...Et si je mets des pointillés, c'est que les recherches en la matière, lancées et publiées depuis peu, pourraient faire de nouvelles découvertes. Alors pourquoi tant d'indifférences et de freins dans un domaine qui se révèle si dangereux pour la santé des gens ? Pourquoi continue-t-on et fait-on tant de pressions pour affaiblir voire étouffer les voix de chercheurs ou d'agriculteurs qui s'y opposent ?

Ce livre nous dévoile alors les coulisses qui ont présidé à cette politique et qui reposent sur une imbrication des rôles de l'Industrie et de l'Etat. Dès la naissance des premières instances, la chimie a bénéficié d'un accueil enthousiaste auprès d'un public d'élites qui voyait en elle un outil décisif pour enrayer la faim. Des noms, plusieurs, sont cités qui ont joué un rôle clé dans l'essor de ces produits à travers toute la France agricole : Raucourt et Trouvelot, 2 scientifiques qui ont poussé les autorités à intervenir par la création du SPV et de l'INRA ; Bustarret qui, fasciné par le modèle américain de l'agriculture intensive, a contribué à son développement en France mais surtout Fernand Willaume, l'ingénieur de Péchiney, véritable fondateur du lobby des pesticides...Depuis pratiquement pas de changement dans les procédures officielles pour commercialiser de tels produits. Tellement que le Comtox, le comité qui évalue leur toxicité, est encore très largement représenté par des experts qui travaillent ou ont travaillé pour l'Industrie alors que le comité d'Homologation, dépassé par le nombre de dossiers à traiter, autorise encore et toujours plus...
D'où ces chiffres énormes qui font état de 96% de cours d'eau pollués en France et plus de 50 % de notre alimentation contaminée. Cela, en dépit de lanceurs d'alerte tels que le Professeur Lefeuvre (dès les années 80), reconnu pour ses travaux sur la pollution des eaux ou encore Dominique Belpomme, chercheur qui est célèbre pour ses études sur le cancer comme maladie de l'environnement.

Alors que faire ? Car certes on s'instruit mais on est aussi déçu par l'immobilisme des élites qui restent divisées sur ce sujet et en atténuent trop la gravité. On est aussi gêné de voir qu'un problème si profond et si généralisé en France n'est l'affaire que d'une poignée de gens. Comment expliquer un si grand manque d'intérêt, de réactions et d'actions ? Ignorance, fatalisme et sans doute, manque d'attraction pour un mal à la fois trop complexe, si vague, sournois, invisible. Il est vrai que l'opinion réagit plus face à du sensationnel qui est manifeste et sort de l'ordinaire. Ce qui n'est pas le cas ici...car les pesticides, c'est bien d'une norme, du quotidien dont il s'agit.
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