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Critique de Bellisa55


Un portrait fort attrayant de notre extravagante Belge en première de couverture, un titre des plus évocateurs, une simple phrase en guise de résumé et me voilà déjà bien alléchée... Qu'a donc bien pu nous concocter encore la charismatique romancière ?

Aux aguets dès les premières lignes de l'ouvrage, je suis curieuse et impatiente de découvrir de quelle manière cette dernière va exploiter et revisiter l'effroyable conte populaire. Conquise très rapidement, je dévore littéralement les pages qui se composent essentiellement de dialogues savoureux entre Saturnine, jeune femme de 25 ans originaire de Belgique et professeur à l'École du Louvre, et Don Elemirio Nibal y Milcar, richissime aristocrate espagnol, âgé de 44 ans, vivant en autarcie depuis l'étrange décès de ses parents et prétendant être l'homme le plus noble du monde.
Choisie parmi une flopée de prétendantes au titre de colocataire qui brûlaient du désir de rencontrer l'homme qui défraie la chronique, suite à la mystérieuse et énigmatique disparition des huit femmes ayant auparavant partagé son fastueux appartement parisien, Saturnine transforme, en effet, la cuisine en un lieu d'affrontement où de la dégustation de mets fins et délicats surgissent de riches discussions nous octroyant la possibilité de définir la personnalité des deux personnages et notamment de cerner la complexité de celle de l'Hispanique. En ce point, en nous offrant un profil psychologique des protagonistes, Amélie innove et enrichit considérablement le conte de Charles Perrault.

Saturnine est une intellectuelle qui, bien qu'appréciant le luxe et ravie de bénéficier de conditions plus que confortables, n'est point dupe sur son hôte. Brillante et subtile, elle ne se laisse pas étourdir par les privilèges dont elle jouit, déjoue assez aisément les pièges tendus par l'hidalgo - elle ne semble guère empressée de pénétrer dans la chambre noire alors que celle-ci, tentation extrême, n'est même pas fermée à clé- et désarçonne fréquemment l'envoûtant quadragénaire.
Don Elemirio est issu d'une lignée de Grands d'Espagne contraints à l'exil en France suite à une insulte proférée par l'un d'entre eux à l'encontre de Franco. Ce nostalgique de l'Inquisition, dont il lit avec grand plaisir les greffes, croit à l'enfer et a recours au trafic d'indulgences pour racheter ses péchés. Dédaignant le monde extérieur qu'il trouve profondément ennuyeux et d'une vulgarité grandissime, l'aristocrate à l'ego surdimensionné vit en reclus mais ressent malgré tout le besoin d'une compagnie féminine car " seule l'extase amoureuse (l') arrache à la dépression ", d'où l'idée de la colocation. Artiste à ses heures, il crée dans différents domaines, cuisine, couture, photographie en mettant en oeuvre la passion qu'il éprouve pour les valeurs chromatiques et le culte qu'il voue à l'or.

Surprenante, la proposition que nous fait là Amélie Nothomb ! Surprenante mais convaincante en ce qui me concerne. L'atmosphère glauque et intrigante, parfois pétillante - " la version fluide de l'or " coule à flots -, parfois glaçante, de son adaptation du conte traditionnel se révèle captivante.

Une petite coupe de champagne pour en débattre ?
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