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Critique de Shaynning


Alors qu'actuellement le marché sentimental vend et glorifie des Bad Boys couillons tous plus cons, immatures et hyper-violents les uns que les autres, ça fait du bien de voir exactement l'inverse ici. du moins, c'est plaisant de voir un homme, Tatsu dit "L'immortel", qui pourrait bien continuer à être le yakuza sanguinaire et dominant qu'il a été choisir de faire autre chose de sa vie et s'offrir le rôle de l'homme au foyer, encore sous-estimés de nos jours. Qui a dit que porté un tablier rend moins sexy?


Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce n'est pas un manga avec une trame narrative continue, mais bien une suite de scène du quotidien. Peut-être cela va-t-il changer éventuellement, mais pour le moment, c'est ce que nous avons.


Ce qui fait l'humour de ce manga tient autant du changement de vocation du personnage principal que sa déformation professionnelle. On ne change pas ses vieilles habitudes du jour au lendemain, ce qui crée toujours une ambiguïté quand aux actions que Tatsu pose. On aura droit à des "transactions" qui ont l'air douteuses, mais qui se révèlent concerner des plants d'herbes fines, ou des hyperboles spontanées, quand Tatsu propose de s'infliger des blessures et des châtiments aux proportions grandement exagérée pour de banals maladresses, tel le yakuza à l'honneur bafoué. Non, mais quelle diva, ce Tatsu...


Un autre élément humoristique revient au décalage physique de Tatsu, qui a des expressions sanguinaires et une aura dangereuse alors qu'il socialise ou tente de se donner une expression décontractée - ce qu'il fait assez moyennement vu sa gueule de motard au sourire de requin. Su ce plan, ce sont davantage les illustrations et les jeux de lumière qui font le travail. En outre, il a les attributs physiques et allure générale qui n'aident en rien: sa carrure imposante, sa démarche intimidante, ses tatouages un peu ostentatoires, son costume noir et ses lunettes de soleil.


Tatsu a une personnalité pourtant charmante, quoiqu'un peu intense par moment. Ultra-maniaque-perfectionniste qui n'en rate pas une pour se donner des défis, Tatsu semble mettre autant de rigueur et de passion dans son nouveau rôle que dans l'ancien. Et il s'en sort admirablement, je trouve. Il est en autre empathie, très serviable, stratégique et toujours volontaire pour aider ses voisins, ce qu'il fait avec une élégance qui peut dégénérer en effrayante efficacité. Surtout, on ne sent à aucun moment que sa nouvelle vie le fait sentir moins "mâle". Un détail qui a son importance, parce que cela fait coexister "virilité" avec "domesticité" et ça, c'est nouveau!


Le filon conducteur des scènes table donc sur son adaptation à sa nouvelle vie, ponctué parfois de gaffes complètement inattendues ou étonnamment puériles. Parfois, on sent les mauvaises habitudes reprennent le dessus, mais heureusement, il peut compter sur son épouse.


Celle-ci est d'ailleurs assez simple, quand on la regarde - je dis cela dans le bon sens et je me maudis d'avoir encore oublié son prénom - je ne suis pas douée avec les prénoms. Bref. C'est une femme de bureau qui a ses manies et ses habitudes, citoyenne en apparence sans histoires et d'un tempérament égal. Je l'apprécie ce personnage, elle a quelque chose de très classe moyenne et donc de près de nous. C'est pour l'avoir épousée que Tatsu a choisi de ranger ses histoires de gang. Elle semble en outre parfaitement saisir les singularités de son époux et ne lui laisse pas le temps de se faire du mal ( dans ses excès de zèle d'honneur, par exemple). Bref, ils font un couple qui semble solide, complice et dont les petits conflits sont de ceux qu'ont les vrais couples. Parfois, la simplicité à plus d'intérêt que les couples torturés et éternellement instables que je croise beaucoup trop souvent dans la culture ces temps-ci. Et je signale que leur relation est saine, basée sur le respect, l'égalité, la complicité et la tendresse. Comme quoi tous les Bad Boys ne sont pas condamnés à être des trou-de-cul, pour un peu qu'ils s'en véritablement donnent la peine. Merci Tatsu!


Aussi, je note que les personnages secondaires aussi sont appelés à bousculer les conventions. Des anciens membre de gang qui se convertissent aussi en divers rôles plus tempérés et conventionnels, des femmes au foyer beaucoup plus débrouillardes et actives qu'elles en ont l'air, et quelques autres cas atypiques qui croisent la route de l'ancien yakuza. Ces interactions donnent souvent de drôles de situations.


En même temps, le manga me donne l'impression de valoriser la vie domestique et sociale du citoyen moyen, ce qui, en soit, n'est pas une mauvaise chose. Ça a un côté léger et apaisant. On parlera de fitness, de cuisine, de ces saletés de bidules que les écrans nous vendent, des soldes où les gens deviennent de vrais furies, de voisinage, de jardinage et de vie de couple. Tranquille, drôle et léger, pourtant atypique. Ça me rappelle mon premier gelato au concombre- fameux en passant!


Parfois, on a besoin d'un truc léger juste commodément étonnant, comme durant une pause dîner ou un après-midi à bouquiner tranquille. C'est le genre de manga qui s'y prête très bien, tout en promouvant des modèles masculins non-toxiques, la vie à la maison - qui n'est pas de tout repos! - et combinant deux univers qui, en principe, ne se rencontrent pratiquement jamais.

Côté dessin, c'est propre et bien fait. Les personnages ont une belle apparence et des proportions relativement calibrées. Visuellement, c'est plaisant et les scènes d'actions sont dynamiques. Il pourrait y avoir une meilleure fluidité dans les transitions, mais globalement, je trouve ce manga agréable visuellement.


Pour un lectorat seinen adulte - Pas tant que ce soit violent, du moins dans le premier tome - mais ce sont les sujets qui sont davantage adulte. Mais si cela intéresse les jeunes adultes et les ados, ça peut convenir.
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