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Critique de Zephirine


Si vous aimez les enquêtes rondement menées, les investigations scientifiques pointues, passez votre chemin car il n'y a rien de tout cela dans Notre quelque part. Il y a bien une enquête, mais elle n'est qu'un prétexte pour mettre un pied et même les deux dans la culture africaine de ce village de brousse du Ghana.

Si une jeune femme, maitresse d'un ministre, ne s'était pas égarée à Sonokrom, village perdu dans la brousse, elle n'aurait jamais fait cette découverte sinistre et puante dans la case d'un planteur de cacao. Bien sûr, la police déboule en nombre considérable sur les lieux de ce qu'on ne peut nommer crime puisqu'on ne sait à quoi on a affaire. Les moyens déployés sont à l'aune de la réputation du ministre et de l'ambition de l'inspecteur principal Donkor, corrompu jusqu'à la moelle, sinon, pourquoi se soucier d'une histoire au fin fond de la brousse parmi les habitants incultes. Et ce mystère sans corps ni coupable doit être traité comme une scène de crime. L'affaire doit se régler scientifiquement avec un coupable idéal, le tout avec un rapport savant et magistral pour les huiles du gouvernement. Et c'est à Kayo que l'on fait appel, Kayo qui a obtenu en Angleterre son diplôme de médecin légiste et qui se morfond dans un laboratoire d'analyses médicales. Bien malgré lui, il doit obéir à l'inspecteur Donkor.
« La joue de l'inspecteur principal tressauta : C'est d'accord. Mais je veux un rapport complet pour le ministre. Style…Les experts »
Et voilà notre jeune homme chargé d'une enquête sur un disparu qu'il va mener scientifiquement grâce à sa mallette magique de légiste. Mais dans ce village, on est bien loin d'Accra et de son modernisme. Ici, il faut respecter les coutumes et écouter les histoires des anciens. Voilà qu'aux méthodes scientifiques et éprouvées viennent s'ajouter l'histoire des esprits. Il y a cette malédiction dont parlent le féticheur et le chasseur, il y a cette histoire de violence familiale. Et il y a des choses étranges qui se passent dans la forêt. Abandonnant ses recherches ADN, Yoko va s'immerger dans cette culture tribale pour approcher au plus près de la vérité. Et c'est là que le récit devient intéressant car on pénètre dans l'histoire des uns et des autres, tous mêlés à l'affaire mais qui s'en remettent aux ancêtres pour régler les litiges.
Quant à l'inspecteur principal, ce qu'il veut, c'est une conclusion d'enquête qui serve ses intérêts personnels, rien d'autre !
Deux cultures, deux mondes se côtoient dans un mélange savoureux et dans la jubilation de la langue, car tout est conté avec force paraboles et proverbes par les habitants de Sonokrom tout en buvant du vin de palme et en mangeant fufu ou sauce palabre.
Après un début un peu fastidieux, on se retrouve plongé dans le chaudron bouillant des traditions orales et des coutumes d'un village tribal qui sait résoudre ses conflits avec sagesse, bien loin de la corruption et de l'arrogance de la ville.
Il faut souligner la virtuosité de la traductrice, Sika Fakambi, qui a su rendre exubérante et très colorée la langue parlée.
J'ai trouvé ce premier roman singulier, dépaysant et réjouissant.



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