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Critique de YvesParis


Sur une carte de l'Afrique, deux lignes se croisent : du nord au sud, d'Alexandrie au Cap, le tracé du chemin de fer britannique rêvé par Sir Cecile Rhodes, de l'ouest à l'est l'axe Dakar-Djibouti reliant l'Afrique occidentale française à la Côte des Afars et des Issas. Au point de rencontre de ces deux lignes, un poste militaire sur le Nil blanc, abandonné par les Anglo-Egyptiens depuis la révolte mahdiste de 1885 : Fachoda.
La crise de Fachoda se résume souvent à ce schéma bien connu. Elle a failli mener la France et l'Angleterre à la guerre dans un contexte d'extrême ferveur nationaliste de part et d'autre de la Manche. Elle éclate quelques années après la Conférence de Berlin (1884-1885) alors que les rivalités coloniales en Afrique atteignent un paroxysme. L'Egypte, placée sous la tutelle de fait du Royaume-Uni, a été chassée du Soudan. Un vide est créé au coeur de l'Afrique où s'affrontent deux impérialismes : le Royaume-Uni d'un côté ne peut accepter de perdre le contrôle de la vallée du Nil, la France de l'autre veut contrarier l'impérialisme britannique et cherche à désenclaver ses possessions d'Afrique centrale.
C'est dans cet esprit qu'est montée, avec le soutien du lobby colonial et l'aval du ministre des affaires étrangères Hanotaux, la mission Marchand. Conduite par un jeune capitaine de l'infanterie de marine (Jean-Baptiste Marchand est né en 1863), la mission mettra plus de deux années pour gagner Fachoda à travers la forêt équatoriale. Quelques semaines après son arrivée, après avoir repoussé victorieusement une attaque des mahdistes, elle voit débouler les forces, supérieures en nombre et en puissance de feu, du sirdar Kitchener. Pendant trois mois, entre septembre et décembre 1898, les troupes se font face.
La crise se règle à Paris, entre le ministre français des affaires étrangères Delcassé et l'ambassadeur britannique Monson qui relaie les instructions de son premier ministre Lord Salisbury. Cette négociation est un cas d'école pour diplomates : il s'agit d'éviter la guerre avec le Royaume-Uni, qui détournerait la France de l'Alsace-Lorraine, sans nourrir le sentiment d'impuissance et d'humiliation de la droite nationaliste prise un instant par la tentation de trouver en Marchand un nouveau Boulanger. Delcassé relève le défi et réussit, six ans à peine après Fachoda, à conclure avec Londres en 1904 une « Entente cordiale ». Cette réconciliation se fait toutefois sur le compte de la mission Marchand, contrainte à une retraite sans gloire par l'Abyssinie.

A la différence de Marc Michel (Fachoda : guerre sur le Nil, Larousse, 2010), Pierre Pélissier qui n'est pas historien de formation ne replace pas suffisamment l'affaire de Fachoda dans son contexte historique. Il utilise les carnets de route des différents protagonistes de la mission pour en relater toutes les étapes. Grâce à lui, on revit la marche épuisante à travers la forêt gabonaise, la traversée harassante des marais du Bahr el Ghazal, l'attente fébrile à Fachoda. Il rend vivace cette odyssée mais n'en éclaire pas suffisamment la raison d'être.
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