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Critique de Hugo


Moi quand j'étais petiot, j'ai vécu un peu chez ma grand-mère, beaucoup maraichère, beaucoup catholique et convaincue en plus, persuadée que je ne ferais rien de mes dix doigts, qu'elle braillait quand je voulais me sauver footballer (verbe du premier groupe) et judokater avec les copains du village…

« Mais menuisier ce n'est pas mal » qu'elle disait la vieille dame… enfin si je ne devenais pas un voyou…

Le mardi c'était permis, « Docteur Quinn » en tête liste, toute violence était proscrite et le vendredi lorsqu'elle était assoupie, affalée et bien ronflante, je me régalais devant "USHUAIA", Je voyageais avec "nico" à travers le monde, moi qui voulais devenir éleveur de dauphins…

Mais parfois la vie est cruelle, à Gaza plus qu'ailleurs certes, l'Afrique est perdue, et l'Asie c'est trop loin, donc en tant que Français moyen chanceux car bien née, je ne suis pas devenu éleveur de dauphins, ni policier, ni informaticien, non, Je suis devenu comme elle a dit mémé :

Menuisier…

Fin de troisième (je me répète), ma professeure de maths décide à elle toute seule qu'en tant que burne (spécialiste en burnage) ou branleur (spécialiste en branlage), ne comprenant rien aux « fonctions infines » et aux « vecteurs », que j'imaginais spatio-temporel… et bien d'après elle, je me devais d'apprendre un métier et vite si je ne voulais pas crever la dalle quand je serai grand un peu comme les somaliens qui commencent tout petits eux, plus habitués que l'on a l'habitude d'oublier par chez nous, mais en mieux quand même avec Resto du Coeur à volonté… donc moi bien flippé d'avoir le ventre qui gargouille, j'ai choisi un métier parmi la liste fournie et menuisier ça rimait avec néné...

Quel beau métier, je n'ai jamais regretté, l'histoire de l'art me fascinait : des Égyptiens à maintenant, le style renaissance, Louis XV, Louis XVI, l'Empire, l'Art nouille… concevoir, dessiner, débiter les billes de merisier, de chêne ou de noyer… dégauchir, raboter, assembler… l'odeur enivrante du verni, de l'huile et des bois toupillés… quel bonheur de travailler.

A 16 ans je n'étais pas très doué manuellement, mais motivé ça oui, alors j'ai bossé sans briller, de l'ébénisterie à la menuiserie, me voilà fraichement diplômé après sept années d'apprentissage … Je prenais mon pied à me lever le matin pour aller bosser de 6h30 à 20 heures dans le froid ou la canicule, les heures supp oubliées qu'ils disaient les patrons engraissés à la sueur de mes mains ( ..culé va…).

Mais moi je voulais gagner de l'argent, plus que le salaire d'un ouvrier, alors j'ai vendu mon âme au capitalisme , avec ambition mais sans conviction, juste pour le gain quoi… Et pis les croquettes des chats ça coute un bras surtout quand ils sont à la diet…

Aujourd'hui je suis cadre, avec un salaire plus que correct, mais je me réveille moins motivé, je traine des pieds, je me plains tout le temps même bourré à l'humour… les gens que je côtoie sont des machines de guerre, sans sourire, leur costume bien repassé, sans humanité, pantin du capitalisme moderne et de la mondialisation, moi pecno de gauche, défenseur des requins, amateur de sommeil, plein d'illusions, chaussé de converses choupinou, style plongeur-beau-gosse, je m'ennuie tous les jours un peu plus, laissant mon imagination voguer sous les jupes des filles qui défilent sur les champs d'Élysées, les jambes au vent, moi dans les embouteillages de la capitale… m'enfin en été, ça défile…

Moi qui voudrait devenir tripoteur de gonzesses, compteur de fleurette, poète pour nénettes, toucher des fesses, au lieu de ça je me bourre au coca, noyé dans cette déprime d'un métier sans vocation… mais de quoi je me plains, de rien allons bon, car j'ai conscience de mes privilèges, celui de pouvoir encore me plaindre…

Cette BD est intelligente, drôle, pleine de vérités sur le monde du travail, tous ces philosophes mis en scène pour dénoncer l'absurdité, le fossé qui existe entre l'antiquité et aujourd'hui, bref un petit bijou d'ironie que l'on devrait mettre entre toutes les mains, pour comprendre, apprendre tout en se cultivant, quel pied…

Donc si un jour quelqu'un avait besoin d'un penseur du dimanche, qui aime les tongs et le monoï, philosophant sur sa médiocrité, prêt a rire pour le plaisir de vous faire plaisir, je suis votre homme, je sais me servir d'Excel, de Word, d'un marteau et d'un burin, je fantasme de farniente, et me prélasse sur les seins des femmes nues prêtent à faire tomber leur robe pour satisfaire mes illusions lubriques…

Mais mon imagination ne fait pas gagner d'argent…Chienne de vie, alors laissez-moi pioncer bordel de dieu...

et FUCK le lundi...

A plus les copains

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