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Critique de Myriam3


Descente aux enfers d'une jeune femme noire de Harlem dans les années 40.

Lutie Johnson est pourtant intelligente, ambitieuse et belle, très belle: trois qualités qui la perdront. Il aurait mieux valu qu'elle ne réfléchisse pas, qu'elle courbe l'échine et accepte sa condition. Etre Noir signifie : pas de travail pour les hommes, ménage, tâches avilissantes ou prostitution pour les femmes. Et un cercle vicieux de misère et de honte qui s'installe.

Les hommes, alors traînent chez eux ou dans la rue, boivent parfois, traficotent. Les femmes rentrent tard, épuisées, les couples s'étiolent, elles se retrouvent seules avec leurs enfants dont elles n'ont pas le temps de s'occuper alors ils rentrent seuls de l'école, ont peur du silence, traînent dans la rue, se font embrigader par de plus forts dans la délinquance, finissent en maison de correction avec un casier judiciaire qui les suivront toute leur vie.

Hors de question se dit et se répète sans cesse Lutie. Elle se promet un meilleur avenir pour elle et son fils. Cette rue dans laquelle ils viennent d'emménager n'est qu'une adresse temporaire: les enfants livrés à eux-mêmes renversent les poubelles, l'été on y dort dans la rue ou sur le perron mais l'hiver on y meurt de froid. Son immeuble n'est pas mieux: murs sales et délabrés, entremetteuse au premier étage qui relance sans cesse Lutie, et un concierge qui attend la bonne occasion pour lui sauter dessus.
Il se trouve que Lutie a eu la chance de travailler quelques temps auprès d'une famille blanche et riche et qu'elle n'acceptera pas que sa couleur de peau soit un obstacle à sa réussite.

On suit les pas de cette jeune femme courageuse en frémissant pour elle et on l'admire pour sa force de volonté, son refus obstiné de tout ce qui pourrait les avilir, elle et son fils. Pas question qu'il soit un petit cireur de chaussures, pourtant cet argent leur ferait tant de bien! Cet argent sans lequel rien n'est possible, qu'il serait si facile à gagner parce qu'elle belle, si séduisante...

Ce roman avait eu un énorme succès aux Etats-Unis quand il avait été publié, en 1946. Il s'agit ici d'une réédition de la collection Vintage Noir, de Belfond, après être passé inaperçu la première fois en 1948. Replacé dans son époque, c'est un morceau de bravoure pour une femme noire et un témoignage triste et révoltant de la condition de la communauté noire.
Tout au long du roman, on veut y croire et c'est là tout le talent d'Ann Petry.
Je remercie Babelio et Belfond pour ce roman dur et bouleversant.
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