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Critique de Nastasia-B


Voici un livre à mettre entre toutes les mains à partir de 10 ans. Le sous-titre nous précise : " Mon premier manuel de pensée critique. " sous-titre auquel je ne souscris pas totalement car d'une part, vu que le coeur de cible sont les enfants et jeunes ados de 10 à 15 ans, j'espère pour eux qu'ils ont eu l'occasion de déjà exercer leur pensée critique avant cet âge.

D'autre part, la pensée critique, ce n'est pas exactement cela. J'ai eu l'occasion de parler récemment du livre de Henri Broch intitulé Les Secrets Des Sorciers qui lui est un vrai manuel de pensée critique destiné aux enfants et qui, lui, mériterait réellement ce sous-titre. Ici, il s'agit d'un manuel d'édification destiné aux jeunes bien plus que de pensée critique. L'un et l'autre sont nécessaires, mais, autant être précis dans les termes lorsque l'on aborde des thématiques aussi importantes voire cruciales pour préparer la génération qui arrive à savoir ce qu'est la " vraie " vie, sitôt qu'ils auront quitté l'école et le refuge de la protection parentale.

En ce sens, je trouve ce livre vraiment admirable. Il énonce des états de faits pas forcément décelables lorsqu'on est jeune avec un cerveau rempli d'idéaux et d'idées toutes faites, véhiculées justement par l'école et les médias et que, malheureusement, trop d'adultes eux-mêmes ne questionnent pas suffisamment.

Bon, c'est vrai que j'ai été un peu agacée par le côté très manichéen du propos, les riches d'un côté, les pauvres de l'autre, pas trop de nuances. Ceci étant, si l'on se place du point de vue du public visé, il est peut-être bon de faire simple afin de poser clairement les lignes directrices du propos.

Ce bémol étant posé, le reste, c'est-à-dire le fond du propos est malheureusement très vrai, trop vrai : les fortunés qui sont l'aristocratie moderne, qui ne vivent qu'entre eux comme pouvait vivre la noblesse de l'Ancien Régime, qui assurent à leurs enfants toutes les conditions d'une pérennisation dynastique de leur fortune, la collusion avec le pouvoir et les médias, les mille et un moyens de ne pas payer d'impôts, le chantage à l'emploi, l'inégalité des chances, etc., etc., etc.

La conclusion de l'ouvrage pour les 99,99 % de l'humanité pourrait être : « Voici dans quel monde tu arrives mon petit, voici ce que tu ne seras jamais, voici comment tu vas te faire rouler. Soit tu te tires une balle tout de suite, soit tu acceptes les règles et tu fais contre mauvaise fortune bon coeur. »

Ceci dit, même si notre monde est à beaucoup d'égards absolument pourri et déprimant, il n'est que le reflet des individus qui le constituent et je dirais même que, effet de neutralisation oblige, le système, pris dans son ensemble, est très loin de l'idéal vers lequel on aimerait le voir tendre, mais aussi franchement moins pourri et détestable que lorsque l'on sonde le fond de la pensée des individus (dans leur majorité). Combien de dictateurs sanguinaires parmi le peuple si le hasard les conduisaient au pouvoir et aux responsabilités ? Combien de tyrans de PME qui jubilent à voir ramper leur personnel et à exercer des fonctions régaliennes ?

Le comportement des riches décrit sans doute avec une certaine exactitude n'est probablement pas si différent de celui de toutes les autres classes sociales si elles avaient les mêmes prérogatives. La pourriture des riches n'est autre, selon moi, que la pourriture de l'humain lui-même, qui est viscéralement inscrite dans le patrimoine génétique de chacun. Ne vous défendez pas si vite, regardez le triste palmarès de nos ancêtres, tout ce qu'ils ont été obligés de faire pour s'en sortir, sur quels critères ils ont été sélectionnés par la nature et ne vous étonnez plus que le système soit ce qu'il est, sauf à vous étonner qu'il puisse être encore relativement correct même pour les plus démunis tellement on sait l'humain capable de pire.

J'en terminerai avec cette citation de Céline qui me paraît assez bien coller à ce propos : « le malheur en tout ceci, c'est qu'il n'y a pas de peuple, au sens touchant où vous l'entendez, il n'y a que des exploiteurs et des exploités, et chaque exploité ne demande qu'à devenir exploiteur. le prolétariat héroïque, égalitaire, n'existe pas. C'est un songe-creux, une faribole, d'où l'inutilité, la niaiserie écoeurante de toutes ces imageries imbéciles, le prolétaire en cotte bleue, le héros de demain et le méchant capitaliste repu à chaîne d'or. Ils sont aussi fumiers l'un que l'autre. le prolétaire est un bourgeois qui n'a pas réussi. Rien de plus, rien de moins. »

Mais ce n'est bien évidemment qu'un avis, qui lui aussi, s'avère parfois de plus en plus pauvre, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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