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Critique de AnnaDulac


Très beau titre en forme d'oxymore pour ce premier roman de Denis Podalydès, acteur de théâtre et de cinéma, dans lequel il raconte, de manière à peine déguisée et sur le mode de l'autodérision, son premier tournage en 1989 sous la direction d'un assistant de Theo Angelopoulos.

Le film s'appelait « Xenia ». Il devient « L'étrangère » dans le roman. Une simple traduction, donc…

C'est cette distance à la fois temporelle et ironique qui permet à cette autobiographie de s'intituler « roman ». le passé est réinventé, à défaut d'être réenchanté, comme on le verra.

Denis Podalydès avait eu l'idée d'un autre titre : « Petit roman comique » en hommage à Scarron. « Fuir Pénélope » suggère mieux une des failles de l'acteur : ne pas s'attacher, devenir autre sans cesse.

Dans le roman, Gabriel (qui est le deuxième prénom de Denis), chagriné par une rupture amoureuse, est embarqué dans un roadmovie qui le mène en Grèce, en Espagne et en Italie sous l'égide d'une équipe de cinéma inexpérimentée. Les chambres d'hôtel deviennent de plus en plus minables à mesure que le tournage avance. Gabriel est même oublié à Fiesole. le matériel est volé. L'actrice principale ne sait pas son texte et l'ânonne phonétiquement, ce qui donne lieu à des scènes très drôles.

Il y a de l'épopée homérique dans ce roman et de la truculence rabelaisienne.
Les personnages sont désignés par des épithètes, comme chez Homère (Ulysse aux mille ruses), mais les qualificatifs évoluent avec les variations d'humeur des protagonistes. Il y a Reina la Souriante, Vassilis le Vieux, le Résigné, Yórgos le Courroucé, Themis l'Indifférente, Milena l'Âcre animal.

Gabriel nourrit son goût des mots en lisant Rabelais qui est abondamment cité (parfois trop). Il se retrouve dans le personnage de Panurge, perdu et dépassé.

Denis Podalydès a beaucoup de talent. Il manie l'autodérision à perfection, mais ne craint pas de s'aventurer sur le terrain du chagrin, lorsqu'il évoque la rupture de Gabriel avec Marianne et les lettres qu'il lui écrit.

Ce livre est un bonheur d'écriture. Il est intelligent, gourmand. le lecteur savoure les mots, comme Gabriel s'extasie en découvrant des mots grecs comme kourasménos (fatigué). Beaucoup de révélations aussi sur le métier d'acteur. Une vraie réussite.

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