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Critique de Christophe_bj


Le narrateur, un jeune homme, a la vocation d'acteur, et bien sûr, il galère de casting en casting. Un jour, il décroche un tout petit rôle dans un film de Nicole Garcia et espère que ce sera le début de la gloire, mais personne ne remarque la seule phrase qu'il a à dire (en anglais !). Cependant, il se lie avec Nicole Garcia qui lui raconte l'histoire d'un figurant américain d'exception, Ariel A. Winthrop, qui a tourné dans cent dix-sept films parmi les plus grands chefs-d'oeuvre du cinéma mondial, et qui a lui-même réalisé un film mythique, Miss None, aujourd'hui disparu. le narrateur devient obsédé par cette histoire, s'envole pour Hollywood où il espère percer mieux qu'en France et enquêter sur le fameux Winthrop. ● C'est le premier roman que je lis de Guillaume Poix et je suis emballé par son originalité et sa drôlerie, et par son style que je trouve superbe (une seule réserve : « le pourquoi », qui revient trois fois, à la place de « la raison »). ● Guillaume Poix vient du théâtre et cela se ressent à la fois dans les dialogues, vifs et très bien menés et dans l'intrigue très bien construite. ● Nous avons ici affaire à un anti-héros, un « loser » comme il se définit lui-même, qui ne cesse de douter de lui, de ses compétences professionnelles comme personnelles (en matière amoureuse par exemple). ● C'est un roman sur le cinéma, et le livre lui-même est très cinématographique, très visuel. ● Star met en scène un jeu sur le réel, comme souvent le cinéma le fait aussi, en associant des éléments fictifs à des éléments très réels, comme de vrais acteurs ou de vrais réalisateurs, avec lequel le narrateur interagit ou bien cite seulement. ● A plusieurs reprises on se surprend à googliser des noms pour voir s'ils sont réels ou pas, à commencer par ce fameux Ariel Winthrop. Et bien sûr par Guillaume Poix lui-même : son texte est-il autobiographique ? ? ● Il y a aussi un jeu sur la notoriété ; la phrase suivante revient comme une scie : « Ce dernier nom ne vous dit peut-être rien et pourtant vous le connaissez. Vous le connaissez parce que vous l'avez vu dans… ». C'est d'ailleurs assez vexant pour les noms cités car, s'ils font partie de la mémoire collective, le narrateur est obligé d'apporter des précisions pour permettre au lecteur de les situer ; il en va ainsi, par exemple, de Grégori Derangère, de Laurence Côte, de marie NDiaye… ● Pour en revenir à Ariel Winthrop, le narrateur répertorie scrupuleusement les différents gestes qu'il a faits en tant que figurant, comme de gifler Gena Rowlands dans Gloria de John Casavetes, et en tire une sorte d'art dramatique. du reste, Guillaume Poix semble lui-même obsédé par ce personnage car il a aussi écrit une pièce de théâtre intitulée Miss None. ● L'humour est partout, comme ces « d'une part » auxquels il manque les « d'autre part » ; comme cette allusion au nom de l'auteur : « après avoir cru vous débarrasser pour de bon de cette boule de poix nauséabonde ». ● le narrateur envisage de faire un film autobiographique, pendant, donc, du roman que nous sommes en train de lire, ce qui occasionne sa mise en abyme : « J'avais plusieurs titres en tête : Un parfait inconnu me semblait idéal si le film se bornait à raconter mon anonymat. On suivrait dans ce cas les manoeuvres incessantes d'un jeune acteur en formation se prenant pour quelqu'un, croyant en son destin, s'enfonçant au fil du temps dans l'échec et le déni, conservant malgré tout une forme d'optimisme que ses proches assimileraient à un délire. […] [J]e me disais qu'il était toujours plus facile pour une star d'incarner le raté qu'elle n'était pas que pour un raté de tenter de devenir une star en jouant le raté qu'il était bel et bien. […] le titre qui s'imposa alors ce soir-là fut Star. C'était à la fois anodin et paradoxal, estimai-je. La star que jamais je ne serais. C'était surtout plus commercial, on pouvait viser le grand public et le succès. On pouvait viser le million d'entrées. C'était l'option prime time à la télé. » ● Marguerite Duras est convoquée plusieurs fois, parfois avec humour : « Nous n'avions vraiment rien vu à Nevers. » ● Il est un peu dommage que la deuxième partie traîne en longueur ; comme le dit le narrateur lui-même : « Cette histoire avec Ariel avait assez duré. » ● Star m'a réconcilié avec la collection « Verticales » de Gallimard, dans laquelle j'ai lu pas mal de navets postmodernes ; ce roman est très riche, foisonnant même, d'une lecture très agréable et je le recommande à tous les amateurs d'humour et d'originalité.
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