AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Eric76


Donald Ray Pollock nous prend par la main et nous entraîne dans une danse macabre, une ronde échevelée et assourdissante, une farandole impudique d'où l'on sort titubant et nauséeux…
Trois gamins, trois frangins affamés, dépenaillés, les pieds profondément enfoncés dans la glaise, d'une ignorance crasse, décident, à la mort soudaine de leur père, de tenter la grande aventure ; de sortir de leur misère qui vient du fond des âges, et de prendre par tous les moyens ce qu'ils désirent ardemment : l'argent, le luxe, les beaux habits, la respectabilité, les femmes. Enfin, pas exactement ! Etre aimé d'une femme…
Leur modèle se nomme Bloody Bill Bucket. Un super-héros de papier, mélange improbable de Jesse James et de Robin des Bois… Un dévaliseur de banques au charme ravageur, capable de fuir dans un trou de souris et d'abattre d'une seule balle une dizaine d'hommes armés jusqu'aux dents… Un héros du far west, un homme du passé, couleur sépia, dans cette Amérique de 1917 qui s'engage dans la première guerre mondiale et tourne le dos à ses légendes pour entrer dans la modernité. C'est en copiant ses aventures que les trois frères comptent bien s'extraire de la misère. Ils se transforment maladroitement en braqueurs de banque et caracolent vers leurs rêves.
Ce sera une longue chevauchée à travers les terres désolées de l'Alabama et de l'Ohio, parfois fantastique, souvent foireuse et pathétique. Durant ce parcours chaotique et sanglant, une kyrielle de personnages hauts en couleurs et tapageurs apparaissent… Bouseux, effroyables sadiques, pauvres hères, mystiques illuminés, esthètes tourmentés, ordures de la pire espèce, piteux jocrisses… Tous entreront dans la folle sarabande, sachant qu'au bout du compte, et même s'ils refusent de l'envisager, ils subiront leur propre déroute.
Dans ce grand jeu de massacre, seuls les innocents au coeur (presque) pur tireront leur épingle du jeu.
Un livre brutal, sans concession, crépusculaire, fataliste, impitoyable (je ne peux m'empêcher de penser à « Unforgiven » de Clint Eastwood) que j'ai eu du mal à lire. Jamais plus de quelques pages par jour pour éviter l'inévitable écoeurement ! Même le sarcasme et le grotesque font grincer des dents…
Mais il se dégage de ce roman une force incroyable. le style est âpre, rageur, tout à la fois sobre et échevelé. Un très grand livre qui s'en va farfouiller dans les profondeurs noires de l'âme humaine. Je ne suis pas prêt de l'oublier.

Un grand merci à Babélio et aux éditions Albin Michel pour m'avoir offert ce livre.
Commenter  J’apprécie          862



Ont apprécié cette critique (78)voir plus




{* *}