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Critique de Littecritiques


Quelle question emplie de sens pour tous les étudiants qui, comme moi, s'apprêtent à passer le concours d'accès à l'École nationale de la magistrature : qui suis-je pour juger l'autre ?

C'est à cette question que tente de répondre Serge Portelli, ancien magistrat devenu avocat. Cet essai a été publié dans la collection « Ce que la vie signifie pour moi » : quel fort symbole de corréler ainsi la justice et la vie. L'auteur nous livre quelques réflexions sur le sens de la justice, tant au sens littéral que figuré. Littéral car, en tant qu'ancien magistrat, il aborde quelques affaires qu'il a eu à connaître. Figuré car juger, est-ce toujours être juste ? Tous les jugements sont-ils justes ? Toutes les lois sont-elles justes ? On ne peut alors s'empêcher de penser à Antigone rétorquant à Créon : « Tes lois, crois-moi, sont peu de choses à côté des lois naturelles et immuables des dieux », thème d'ailleurs abordé par l'auteur avec ce soupir de satisfaction « Ouf ! Antigone a été acquittée ».

Dans cet ouvrage, il aborde donc son expérience de magistrat : la perte d'un détenu retrouvé pendu dans sa cellule, l'exploration du concept de désistance, le rejet du fatalisme face à la récidive, l'importance de la motivation des jugements, la manière de parler aux victimes et de raconter leur histoire. Il est, à ce propos, la raison pour laquelle l'article 81-1 du code de procédure pénale dispose que le juge d'instruction peut ordonner une enquête de personnalité de la victime. Il relate avec justesse la réalité derrière la robe de magistrat : « La première audience correctionnelle que je présidai fut terrible. (…) Je me doutais bien d'une embrouille en achetant cette robe. Elle était bien plus qu'un déguisement. Il y avait tout un paquetage invisible. Une façon de vivre, de se tenir, de penser et de parler ».

Ce livre est humain avant tout, à tel point qu'à la fin, l'ancien magistrat remercie tous ceux qu'il a jugés pour tout ce qu'ils lui ont appris. Il livre son expérience sans artifice, avec humilité et modestie. On sent la responsabilité de la fonction qui pèse sur ses épaules et son désir de l'exercer avec indépendance et impartialité. Il déclare, à propos d'un notable, qu'il convient de le juger comme n'importe qui. « Si je ne peux pas prendre les réquisitions prévues, je vous rends l'ensemble des dossiers. Je n'irai pas à l'audience ».

C'est un récit court mais intense, une rencontre extraordinaire avec un juge qui croit en l'homme. Il déclare à ce propos « Si je suis persuadé que tout homme peut changer, c'est que moi-même j'ai changé du tout au tout ». Je conclurai ainsi : quel bonheur d'avoir fait la connaissance de cet homme par le biais de son écrit, aux valeurs et aux idéaux intacts. Merci Monsieur.
Lien : https://littecritiques.wordp..
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