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Critique de LaBiblidOnee


Ca fait des années que je me dis que, pour Noël, je lirai Père Porcher de Terry Pratchet. C'est le vingtième tome des annales du Disque-monde mais il peut se lire individuellement. le disque-monde est un monde plat bordé de chutes d'eau, porté par quatre éléphants eux-même juchés sur une tortue géante. Ca pose l'ambiance de ce monde satirique délirant, où la fantasy, autant moquée que les Hommes, est prétexte à réflexion humoristique sur des sujets de société.


Cette fois le Père Porcher a disparu juste avant la nuit du Porcher. Les enfants vont être très déçus et la croyance en ce Porcher qui amène les cadeaux sera un peu plus amenuisée au profit des parents. La Mort ne peut pas laisser faire ça, il en va de l'équilibre du Disque-monde. Il (oui la Mort est de sex… genre masculin^^) prend alors les rennes du traineau et remplace le vieux barbu. Armé de son plus beau HOHOHO en lieu et place de sa faux, et d'un coussin sous sa ceinture (ben oui, la Mort est squelettique, à la base), il tente de faire illusion MEME SI DÈS QU'IL PARLE LES GENS ONT COMME UN DOUTE sur son identité.


Pendant ce temps-là, sa petite fille Suzanne enquête sur la disparition du Père Porcher pour tenter de le retrouver au plus vite, car la Mort n'est pas psychologiquement prêt à affronter l'amour des gens et assumer le rôle du faiseur de miracles. Déjà, il déraille, et Albert le lutin fait tout ce qu'il peut pour maintenir un semblant de sens à tout cela. Mais ce n'est pas le pire, non, selon mes sources, le bruit court qu'on aurait voulu tuer le Père Porcher, et tout espoir ou illusion de ce monde ! Pourtant, étrangement en parallèle, toutes les créatures que l'esprit humain invente pour expliquer ce qu'il ne comprend pas prennent vie (le monstre mangeur de chaussettes, l'homme ciseaux coupeur de pouce,etc…), bref tous les monstres et fées imaginables de nos enfances !


Le monde est donc en grand danger. Tout ceci est fort déjanté. L'humour de Terry Pratchet vient à bout des plus sceptiques, malgré un récit assez délié passant des aventures d'un groupe de personnes à l'autre. Malgré tout, c'est une lecture qui questionne intelligemment l'existence de nos mythes et nos croyances. le Père Porcher est finalement ni plus ni moins que le dieu de l'hiver et comme tout dieu, pétri des contradictions de l'âme humaine qui le façonne : à la fois immortel mais dont l'existence est tout entière suspendue à un seul fil : celle de notre croyance en lui. Si l'on cesse d'y croire, il n'existe plus et meurt avec notre croyance… Sauf si l'on part du principe qu'il demeure toujours un petit quelque chose quelque part des croyances perdues. Car peut-on vraiment se passer à jamais de l'espoir pour vivre ? Et qu'est-ce qu'un dieu, ou un Père Porcher, sinon la personnification de l'espoir : l'idée que, lorsqu'on ne peut plus nous-même, il existe quelqu'un quelque part pour réaliser nos voeux et prières, nous donner ce que l'on veut… si l'on est assez gentil toute l'année pour les enfants, ou si l'on aime son prochain à plus long terme toute une vie pour les adultes. C'est parfois la seule chose qui donne le force de continuer.


Mais le rôle habituel de la Mort est de prendre des vies, pas de donner ce qu'ils veulent aux gens. Alors la joie de donner plus que de recevoir nous le tourneboule complètement, et il commence à se prendre pour le Robin des Bois des rôtis, et même à accorder des faveurs qu'il ne devrait pas accorder, sous peine de changer l'équilibre du monde - comme tente de le lui faire comprendre Albert le lutin :


« - Le monde serait dans une belle pagaille si les gens obtenaient ce qu'ils demandent, non ? (…) A quoi ça rime un dieu qui donne tout ce qu'on veut ?
- AUCUNE IDÉE.
- C'est l'espoir qui compte. Une part importante de la foi, ça, l'espoir. Donnez aujourd'hui de la confiture aux gens, et ils s'attablent pour la manger. Mais promettez-leur d'la confiture pour demain, et vous les faites cavaler jusqu'à la fin de leurs jours.
- ET TU VEUX DIRE QU'À CAUSE DE ÇA LES PAUVRES REÇOIVENT DES CADEAUX SANS VALEUR ET LES RICHES DES CADEAUX DE PRIX ?
- ‘xact, fit Albert. C'est le sens de la fête du Père Porcher. »


« - SE CONTENTER DE CE QU'ON A, C'EST ÇA L'IDÉE ?
- A peu près maître. Une bonne réplique divine, ça. Pas trop leur donner, et leur dire de s'en contenter. D'la confiture pour demain, voyez.
- (…) CE… N'EST PAS JUSTE.
- C'est la vie maître.
- MAIS JE NE SUIS PAS LA VIE, MOI.
- Je veux dire que c'est comme ça que c'est censé marcher.
- NON. TU VEUX DIRE QUE C'EST COMME ÇA QUE ÇA MARCHE. »


Bon, pour être honnête je n'ai pas toujours tout suivi à cet univers fantasy, ni n'ai été passionnée par l'intégralité du récit au point de rentrer vraiment dedans. Pour une fois, je me dis que peut-être j'aurais mieux navigué dans ce monde si je l'avais exploré via les 19 tomes précédents. Mais j'ai aimé la réflexion et l'humour : le joyeux bordel qu'est ce joli conte de Noël pour les adultes, aux dialogues souvent hilarants, m'a raisonnablement divertie. Une parodie de nous-mêmes et des contradictions de notre Humanité, de nos croyances et certitudes. de ce qui nous rend humain.
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