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Critique de yannlerazer


La couleur n'a pas toujours été douce, à l'objectif de Raymond Depardon, bien qu'il en fut un adepte, dès ses premières prises de vue, à ses 16 ans. Ce n'est d'ailleurs qu'un an plus tard, qu'il photographie Edith Piaf, en 1959 : le maquillage ne rend pas sa grâce à la carnation d'une femme dévorée de l'intérieur. Pourtant, on se jette dans ses yeux, même globuleux. Ce n'est pas Piaf, c'est la détresse vêtue en femme. Cela prend aux tripes.

Depardon, c'est ce jeune homme sur son scooter, que reprend l'affiche de l'exposition. L'élégance de l'extérieur révèle l'élégance intérieure, un Gabin de la photographie, qui n'aura de cesse d'empoussiérer ses chaussures, un peu partout où les agences l'enverront. Au Chili, en 1971, il découvre que le lieu qu'il choisissait pour prendre ses photos était « lui-même un événement ou plutôt un prétexte. »

A Beyrouth, en 1978, il n'est pas photographe de guerre ; il prend « ses conséquences et tout ce qui se passait en marge des conflits. » Ainsi voit-on la vie quotidienne se poursuivre : séance chez le coiffeur qui sèche les cheveux d'un client de la main gauche, tandis qu'à portée de sa main droite, une kalach est accrochée au mur. Les Chrétiens continuent de se marier à Notre-Dame-du-Liban, en sortant leurs grosses cylindrées américaines, et en portant un smoking en pleine journée : du pur jus !

Glasgow, c'est une autre lumière, noire, métallique, aveuglante quand le soleil frappe le charbon. Les pauvres boivent dans la rue, les enfants font des bulles roses avec leur chewing-gum, et un couple ahurissant, vieux et laid, pose devant une limousine Rolls Royce : même la richesse perd de sa lumière sous les cieux de Glasgow.

Alors, Un moment si doux, c'est un peu autre chose. C'est la capture de la lumière et de la couleur pour ce qu'elles ont de magique, de beau, d'apaisant, de chaleureux, de réconfortant… Un sapeur éthiopien, de blanc vêtu passe devant un façade rouge : c'est une photo qui fait office de révélateur – quel beau sublime en photographie – car derrière l'objectif, on se demande si Depardon, après en avoir tant vu, n'a pas un petit sourire en coin, pour lequel tous les hommes qu'il a mis dans sa boîte, y seraient un peu pour quelque chose.

(Parue dans Blake n°61)
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