La Coupable de la Chandeleur

L'auteure, charentaise, reconstitue, à partir d'archives qu'elle a elle-même dépouillées, la vie d'une Charentaise, Marguerite Pillon, née sous Louis XV et décédée sous Louis XVIII à près de 80 ans. Si cette femme, modeste couturière, a laissé une trace dans L Histoire, c'est qu'elle a failli mourir beaucoup plus jeune, et pas de mort naturelle. Car après avoir été séduite et déflorée par un coureur de jupons qui a profité sans vergogne du coup de foudre qu'il a produit en elle, Marguerite se retrouve enceinte ; naïveté ou déni, elle refuse obstinément de le reconnaître et de faire taire son sentiment pour celui qui l'a mise dans cet état. La rumeur fielleuse enfle en même temps que s'arrondit son ventre. Marguerite pourrait y mettre fin en déclarant sa grossesse auprès des autorités : sa réputation n'en serait pas redorée mais cette démarche la mettrait à l'abri de poursuites éventuelles pour infanticide au cas où l'enfant ne survivrait pas. Car la sanction de ce crime consistant à mettre au monde un être qui n'aura pas pu être baptisé avant sa mort est terrible : c'est le plus souvent la pendaison. Marguerite y échappera.
En relatant presque au jour le jour les tourments à la fois intimes et sociaux endurés par Marguerite tout au long de l'année de son viol, l'auteure brosse un tableau détaillé de la vie quotidienne dans une petite ville de province trente ans avant la Révolution (celle-ci abolira la peine de mort pour les femmes s'étant soustraites à la déclaration de grossesse). Mais si la maîtrise des ses maternités par chaque femme est une avancée majeure du XXe siècle, la problématique du viol et de l'ascendant des hommes sur les femmes, en revanche, n'a guère évolué depuis le XVIIIe...