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Critique de candlemas


Ce livre était présent dans ma bibliothèque personnelle suite à un désherbage de celle de mon université. Il m'avait donc suivi depuis plus de 20 ans, et il était donc temps de le lire...

Ouvrage politique et polémique, La Grâce de l'Etat a été écrite par Jean-François Revel en 1981, quelques mois après la victoire des socialistes et dans les premiers mois du 1er septennat Mitterrand.

J'ai eu envie de cette lecture principalement pour mieux connaître Jean-François Revel, ce "philosophe" donnant la réplique à son moine de fils, Matthieu Ricard, dans l'ouvrage éponyme de 1997. Réputé pour son style "flamboyant", redoutable pamphlétaire, académicien décédé en 2006, journaliste libéral pourfendant dans L' Express puis le Point les errements du pouvoir socialiste, il n'a pas été plus tendre au début des années 90 avec le Président Chirac.

En fait, dans la Grâce de l'Etat, et en dépit de tirades dont le mordant et l'ironie ont pu parfois le faire taxer de frivole, appréciant les effets de manche, Jean-François Revel analyse avec une lucidité et un réalisme rétrospectivement remarquables la mise en place du nouveau pouvoir socialiste au début des années 80.

Ainsi, lui qui fut très à gauche avant 1970, et même séduit un temps par le marxisme, il relève dans ce livre le manque de cohérence doctrinale et économique de la rhétorique socialiste. le virage opéré par le leader socialiste dès 1983, bien avant l'aveu d'une partie de la gauche française de son glissement vers la social-démocratie début 2010, lui donneront raison. de même, les critiques qu'il dresse à propos des nationalisations, réalisées pour des raisons idéologiques sans rationalité économique, des dérives de l'audiovisuel public, de l'Etat bureaucratique, de l'activisme culturel colbertien de l'époque, apparaissent elles aussi rétrospectivement souvent pertinentes.

Tout au plus pourra-t-on rétorquer à ce libéral par amour des libertés individuelles et à ce défenseur du capitalisme par pragmatisme (un système imparfait, mais sans alternative sérieuse) que les théoriciens libéraux ne sont pas non plus dépourvus d'a priori idéologiques, et que, même si 20 ans plus tard, aucune alternative sérieuse nouvelle n'a réellement émergé, le système dominant n'en montre pas moins, à son tour, ses faiblesses intrinsèques. Ainsi, les analyses classiques selon lesquelles la progression de la richesse collective bénéficie aussi aux plus pauvres, ne sont plus vraies aujourd'hui.

Pour finir il est certain que cet ouvrage a vieilli. Les attaques cabotines contre Mitterrand ou Marchais ne font plus rire. Néanmoins, certains passages m'ont paru intéressants et transposables à l'observation de notre vie politique actuelle -les vieilles recettes de conquête et de consolidation du pouvoir n'ont hélas pas tellement changé-.

De plus, derrière son côté journalistique et vulgarisateur, il ne faut pas oublier que Jean-François Revel était aussi un ancien de la rue d'Ulm, agrégé de philo, ce qui fait qu'il n'est pas seulement un observateur et chroniqueur de la vie politique de son temps -ce que sont bien souvent seulement la plupart des journalistes, ce quoi rend sans intérêt leurs bouquins- ; il analyse et développe aussi une pensée politique, dont on peut étendre les perspectives encore aujourd'hui.

Un ouvrage daté donc, pas incontournable, mais dont la lecture en 3 heures rapides m'aura tout de même offert quelques réflexions intéressantes.
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