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Critique de danaella


La pièce obscure...
Si je devais définir en un mot ce livre, la première idée qui me vient à l'esprit est le mot « dérangeant » ; mais en même temps, il exprime une profondeur qui dépeint le monde contemporain vu par une génération, avec une grande lucidité et sans complaisance.
L'histoire débute d'une façon impersonnelle, un groupe de personnes indéfinies louent ensemble un local qu'ils utilisent selon leurs besoins (bureau de travail, salle d'études etc). Au sous-sol ils aménagent une pièce avec des matelas, des tapis, ils sont jeunes et prêts à tous les excès (boissons, fumerie). Un jour par accident, une panne d'électricité survient, et ainsi naquit la pièce obscure.
Cette caverne accueille « un mélange de tas de corps en un seul, monstrueux, qui se masturbait avec plusieurs bras, se léchait lui-même, un seul corps tentaculaire qui déplaçait tous ses bras, toutes ses jambes ».
Tout ce qui gravite à l'extérieur de la pièce obscure est pris dans le flot continu de la vie, ressentit comme une roue qui tourne sans cesse à en donner le tournis, alors qu'à l'intérieur, le temps reste figé, consolateur, une fenêtre de repos bienveillante.
Ces personnages indéfinis commencent petit à petit à se définir, se caractériser : »le menteur, la vipère, l'intello, le salaud... » Mais le centre d'intérêt pour chacun reste encore la pièce obscure, où ils ont la possibilité de se chercher, « une caverne où les participants prennent de l'énergie pour affronter l'extérieur ».
C'est le moment de la maturité, chacun est happé par ses obligations, et la pièce obscure s'éloigne peu à peu de nous, les personnages s'identifient, Pablo, Maria, Silvia, Jesus, on découvre leurs liens, leur vie, leurs actions. C'est la période des choix difficiles, la crise économique est arrivée, le chômage de masse, les expulsions, puis viennent les manifestations, les actions de lutte, les événements ne sont pas fictifs mais bien réels, comme la manifestation anti-global qui a eut lieu à Gênes où un jeune étudiant a été tué par la police, et la violence policière contre des jeunes manifestants pacifiques lors de leur sommeil dans une école.
Ce récit est entrecoupé par la description de personnages inconnus qui sont filmés devant leur ordinateur. Je vous laisse la surprise de découvrir qui ils sont et pourquoi ils sont là.
Les personnages toujours reliés à cet espace obscur doivent un jour faire un choix qui déterminera leur avenir.
Une génération, ou certains n'étaient pas préparés au renoncement, et continuent à vivre dans leurs illusions, d'autres qui s'adaptent et anticipent trop vite, et ils sont pris dans les filets de la désobéissance.
Ce n'est pas un livre tendre, l'auteur hache sans complaisance toutes les situations de l'existence avec brio, sa prose devient subtile et élégante quand il nous invite dans cette communion de groupe.
Même si au début, je lisais ce livre comme un spectateur méfiant, un seul oeil dans le trou de la serrure, petit à petit je me suis sentie happée à l'intérieur de la pièce obscure, quelque fois avec dégoût, d'autre fois avec curiosité, mais à la fin, oui j'ai aimé ce livre dérangeant.

Merci à l'équipe de Babélio qui m'a permis de découvrir cet auteur très intéressant.
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