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Critique de pierrebox


Guillaume Robin (de son vrai nom Robinet), le narrateur, est un romancier médiocre, vendant peu ses livres, toujours en mal d'inspiration, qui désespère son éditeur. Un quinquagénaire vêtu d'informe et de démodé, enfermé dans une routine quotidienne affligeante et plate, et dont les seuls déplacements qu'il s'autorise se limitent à la boulangerie et au supermarché. Il ne fréquente plus guère que son éditeur, François, son seul ami, en vérité. Celui-ci est sa seule relation.
Robin est obnubilé par la disparition, quelques années plus tôt, de l'amour de sa vie, une certaine Mandoline, pétillante jeune femme aux rondeurs appétissantes. Depuis la séparation brutale et cruelle, tout est devenu pour Guillaume fade et morne, et il ne vit que dans les souvenirs des bonheurs perdus.
Un événement va tout bouleverser : c'est la découverte du corps d'un inconnu, le long de la départementale qu'emprunte chaque jour Guillaume pour se rendre à la boulangerie au volant de son break démodé.
N'en disons pas plus, pour ne pas « divulgâcher » le roman.

Il y a bien entendu, dans cet opus de Jac Saint-Fleur, une intrigue qui sans cesse instille le doute dans l'esprit du lecteur. Est-ce un accident ? Un meurtre délibéré ? Qui a renversé l'inconnu ? Et que sait réellement Robin, qui est passé sur la départementale presque au moment de « l'accident » ? La police enquête... L'autrice nous conduit sur des pistes (fausses?) au gré des errements et des digressions du narrateur, jusqu'à un dénouement tout à fait inattendu.
Mais il y a autre chose de bien plus important, dans le roman de Jac Saint-Fleur. Et à mon sens, c'est ce qui en fait tout le sel, ou disons plutôt, le piment. Cet autre chose, c'est l'écriture. le ton. L'humour. le futile se mêlant au sérieux. le contraste permanent entre la gravité des faits et la manière dont ils sont relatés. La nostalgie et les états d'âme rapportés avec une légèreté décalée qui en fait tout le charme. Et qui est réellement ce personnage si fade en apparence, mais peut-être pas autant que lui-même se plaît à le laisser penser.

Jac Saint-Fleur ne se contente pas d'accrocher son lecteur avec une intrigue originale, elle le captive encore davantage grâce à sa plume alerte et incisive. Au delà d'un récit à l'apparence de trompeuse légèreté, on y trouve une peinture profonde de l'intime de chacun d'entre nous. Ce sont les doutes qui angoissent tout écrivain, ce sont les affres de tout amoureux déçu, c'est la nostalgie d'une jeunesse à jamais disparue, c'est la mélancolie des bonheurs perdus, c'est la vision désabusée de l'autre, des autres, de tous les autres, c'est encore la platitude affligeante de nos routines quotidiennes, pour peu que l'on y prête quelque attention.

Ce qui est remarquable encore, c'est le plaisir que cette romancière semble avoir éprouvé à se glisser dans la peau d'un homme. On le devine tout au long du récit. Changer de sexe, le temps de l'écriture d'un roman, c'est un fantasme de beaucoup d'écrivains, et ici, Jac Saint-Fleur (oui, c'est une femme) a de tout évidence parfaitement réussi !
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