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Critique de PhilippeCastellain


Il y a dans l'histoire bien des empires oubliés dont la puissance déchue n'est plus qu'une rumeur auréolée de mystère. Mais il en est un qui plus que tous les autres excite la curiosité, et où il n'y a presque rien pour la combler : les Khazars. le seul royaume connu de l'histoire moderne ayant fait le choix de se convertir au judaïsme ! Pourquoi ? Comment ? En quoi cela impacta-t-il son histoire et celle de l'Europe ? Que devinrent ces convertis après la chute de leur empire ? Des questions qui pour l'essentiel demeurent encore en suspens et dont ce livre, plutôt un ouvrage de vulgarisation, fait globalement le tour. Ce qui est vite fait : les sources écrites se limitent à quelques correspondances diplomatiques ; les sources archéologiques sûres sont rares.

La seule chose qui soit vraiment claire, nous explique-t-on, c'est qu'à la base les Khazars n'étaient qu'une tribu des steppes. Une tribu comme il y en eut des centaines, dont pendant des siècles les éphémères empires se succédèrent du Danube jusqu'au Pacifique. Comme les Huns ou les Mongoles, les Khazars ne représentaient donc qu'une petite faction dominant un territoire multiethnique, qui allait de la Crimée jusqu'à la Caspienne, et au sud – et c'est là que cela devient intéressant – au Caucase. Et sur cette frontière sud, l'empire byzantin et le califat omeyade se livraient une guerre sans merci.

Les Khazars se retrouvèrent vite impliqués dans le conflit entre les deux. Les missionnaires chrétiens et musulmans se mirent rapidement à propager leurs fois parmi leurs populations sujettes. le choix du judaïsme était donc stratégique : appuyer leur indépendance tout en adoptant un système religieux analogue à celui de leurs rivaux, capable de donner la même force de cohésion. On sait cependant que des populations chrétiennes, musulmanes et adeptes des religions traditionnelles cohabitaient aussi sur leur territoire, ce qui représente un niveau de tolérance assez extraordinaire pour l'époque.

La vraie question malheureusement, l'ouvrage ne peut que le souligner, reste en suspens : quelle était la proportion de juifs dans l'empire Khazars ? Constituaient-ils une petite élite, ou la majorité de la population ? Rien ne permet de le savoir. Or cela possède une implication moderne innatendue. Si les conversions ont été limitées, leur postérité a sans doute été très limitée. Mais si elles ont été massives, alors il est probable que les Khazars soient les ancêtres de la majorité des juifs d'Europe (Ashkénaze) ! Initialement, cette hypothèse fut faite pour tenter de désamorcer l'antisémitisme chrétien traditionnel : les juifs d'Europe n'étaient pas les descendants de ceux qui avaient tué le Christ et persécuté ses premiers disciples. Mais rapidement une autre lecture suivit : dans ce cas ils n'avaient aucun lien historique avec la terre d'Israël…

Assez vite cependant l'ouvrage épuise sa matière et ‘meuble' avec plusieurs chapitres sur la perception historique des Khazars au fil du temps, l'historiographie Khazars, des portraits des historiens les ayant remis au goût du jour, etc. Une lecture un petit peu décevante donc, mais peut-être est-ce dû au sujet lui-même. Il n'en constitue pas moins une très honnête entrée en matière pour découvrir ce chapitre fascinant de l'histoire.
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