AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de mesrives


Stabat mater... dolorosa
Une voix s'élève dans la nuit
Une voix muette, intérieure, mais audible
violente et intense, une prière ou une déclaration.
Un psaume scandé par une jeune fille, Cécilia.

Chaque nuit depuis des années, elle quitte le dortoir et, rejoint en cachette son refuge dans l'obscurité de l'orphelinat endormi, ici, à l'Hospice de la Pietà de Venise.
Là, dans cet espace d'enfermement, elle a réussi à construire son coin de liberté, à l'abri des regards de la communauté, un pont qui la conduit des ténèbres à la lumière car ici est la place de son écritoire imaginaire.
Ici, elle écrit, elle libère sa parole spoliée, en traçant des mots adressés à sa mère, Madame Mère, sur le moindre petit bout de papier, des bouts de portée subtilisée.
Une succession de traumats semblent l'engloutir comme l'étaient les corps de bébés jetés dans les canaux de la cité quelques siècles auparavant mais, surtout, une force vitale grandissante, une énergie démesurée pour ne pas se fondre dans le royaume des ombres lui permettent de ne pas se noyer et de remonter à la surface pour ne plus être ce « poisson aux yeux voilés venu mourir à fleur d'eau ».

Un très beau texte de Tiziano Scarpa servi par une écriture poétique et toute en finesse dont les courts paragraphes résonnent comme une psalmodie faisant échos aux récitations des chapelets des bonnes soeurs.
Un univers clos, spirituel et religieux où l'héroïne puise ses ressources pour s'échapper, s'exprimer dans la musique sacrée à laquelle chaque orpheline est promise depuis leur abandon.

Le lecteur ressent très bien le voile noir qui enveloppe Cecilia et dans lequel elle se débat.
Ignorance. Cruauté. Obéissance.
Ignorance de ses origines, de son identité, de la maternité, du corps, de la sexualité...
Cruauté d'une vie monotone au quotidien ordonné et réglé, une vie murée.
Obéissance à l'ordre religieux et à sa communauté.
Douleur et peur.

Une lecture très forte et émouvante qui nous ouvre sur une solitude, celle d'une jeune fille de seize ans qui en cette fin de 18ème siècle s'éveille à la vie, se transcende par la musique en côtoyant et en se faisant remarquer par le nouveau prêtre nommé à l'Hospice de la Pietà, le tout jeune Antonio Vivaldi.
Espérance et renaissance.

A travers son héroïne, Tiziano Scarpa, exprime toute sa sensibilité et par son récit rend hommage à Venise et Vivaldi.
Une très belle découverte.
Stabat mater dolorosa
Commenter  J’apprécie          9429



Ont apprécié cette critique (84)voir plus




{* *}