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Critique de Acerola13


Le but de cet ouvrage est énoncé dès les premières pages : démontrer que loin de l'utopie qui consiste à voir en internet le nouvel outil annonçant l'avènement de la démocratie pour tous, internet est en réalité soumis aux mêmes fractures (sociale, numérique...) et aux mêmes inégalités que les structures offline. Dès lors, on peut se demander si le militantisme de gauche et ou de droite "pèsent" réellement le même poids et ont les mêmes chances pour se faire entendre sur la toile et sur les réseaux sociaux...

Pour sa démonstration, l'auteur choisit l'étude d'un cas qui rendra perplexe tout lecteur européen : la lutte pour ou contre la possibilité de se syndiquer pour les fonctionnaires de la Caroline du Nord, et la part du militantisme online dans la stratégie des deux camps.

S'ensuivent de longs paragraphes sur les raisons qui ont poussé l'auteur à faire un tel choix, la méthodologie utilisée, une petite biographie au passage, un rappel d'évènements américain (élection de Trump) et français (gilets jaunes)...qui, s'ils peuvent paraître garants d'une démarche scientifique et raisonnée, plombent dès le début la lecture.

Après une longue démonstration et de nombreux comptes-rendus d'interviews, on retient finalement que contrairement aux croyances idéalistes, les notions d'organisation, de coûts et d'idéologie ont un impact non négligeable sur l'efficacité de l'activisme en ligne (d'ailleurs, c'est amusant puisque c'est le métier de certaines personnes...On appelle ça du marketing digital !).

Jen Schradie nous rappelle donc que les classes ouvrières souhaitant se mobiliser rencontrent autant de contraintes (manque de moyens, de compétences, d'accessibilité à la technologie, méfiance, peur de la répression) en ligne que dans la vie réelle, tandis que les classes conservatrices plus aisées se mobilisent plus efficacement du fait de leur organisation souvent plus structurée et hiérarchisée.

Une meilleure organisation, plus de ressources, une hiérarchie claire, une aisance face à des outils numériques employés tous les jours : le camp conservateur semble bien plus bénéficier d'internet que ses concurrents...Internet serait-il donc de droite ?

Au-delà de cette entrée en matière (les 4/5 du bouquin) qui semble couler de source, même si l'on en parle peu, l'argument que j'ai trouvé le plus intéressant est celui de l'importance de l'idéologie : la position des conservateurs est celle de missionnaires désireux de convaincre des individus d'adhérer à leur Vérité ; leur utilisation d'internet serait donc plus individualiste : ils cherchent à toucher le plus grand nombre d'individus pour les convaincre un à un, et "informationnalisent" leur Vérité en alimentant un vaste contenu sur internet. Au contraire, l'objectif des activistes de gauche vise une mobilisation du collectif, l'émergence d'un débat, et est plombé par une culture du compromis moins efficace et forcément moins vendeur qu'une Vérité martelée de toute part !

Pour résumer ce pavé indigeste, je dirai qu'il contient des observations intéressantes et pertinentes qui brisent le mythe d'un internet providentiel au service de l'humanité et de la démocratie, mais que l'essence du bouquin aurait pu être résumée et explicitée en moins de 150 pages. Dommage !
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