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Critique de HordeDuContrevent


Alors que vos désirs tournent rouge et que vous vous demandez si l'herbe est plus verte ailleurs, je vous invite à lire La chambre bleue, vous vous éviterez bien des nuits blanches ainsi qu'un avenir noir… Un manuel à mettre entre les mains de tous jeunes couples, à placer dans toutes tables de chevet des hôtels en lieu et place de la Bible, c'est plus radical pour ne pas pêcher…
Car oui, ne vous fiez ni au titre, ni à la couverture bleutée de ce livre de Georges Simenon, ce livre délicieusement désuet, est noir, aussi noir que la chambre de ces amants frénétiques est bleue.

Nous voilà à Saint-Justin-du-Loup, au début des années 60, un petit village français, où tout le monde se connait et où les ragots sont légion et vont bon train. Nous sommes directement dans l'interrogatoire que subit Tony Falcone, interrogatoire au cours duquel, au fil des questions, se mêlent les souvenirs de cet homme qui trompait sa discrète femme Gisèle, avec la vibrante Andrée, grande femme statuaire connue à l'école primaire.
Tous les jeudis ils se retrouvent à l'hôtel du frère de Tony, dans cette chambre bleue, parenthèse hors du temps n'appartenant qu'à eux. Des mots doux murmurés, des corps à corps passionnés, des promesses tels des mots n'ayant de valeur qu'entre les quatre murs lavande…Dans la chambre bleue, rien n'est vraiment réel, du moins d'une réalité différente.
Nous nous doutons qu'il n'est pas accusé pour cet adultère mais jusqu'à la fin du livre le mystère reste entier sur ce qui s'est passé et l'angoisse enfle au fur et à mesure des pages. Tony raconte, raconte de nouveau, connait les mots par coeur les ressassant ad nauseum.

« Combien la vie est différente quand on la vit et quand on l'épluche après coup ! Il finissait par se laisser troubler par les sentiments qu'on lui supposait, par ne plus reconnaître le vrai du faux, par se demander où finissait le bien et où commençait le mal ».

J'ai profondément aimé ce livre que j'ai dévoré d'une traite. C'est un policier de facture classique très réussi qui nous tient en haleine jusqu'au bout. C'est une description d'une époque passée, celle des années 60 au sein des petits bourgs français où les hommes commettent facilement quelques écarts sans que cela porte à conséquence, où « le lundi est jour de lessive, mardi ou le mercredi, selon le temps, selon que le linge est sec ou non, celui du repassage », ce sont les senteurs de lieux campagnards, celles du vin et des alcools, des ragouts qui mijotent…
C'est un roman d'ambiance dans lequel on plonge dans l'intimité d'une famille marquée par le non-dit de l'adultère qui entache le couple, ayant l'intelligence et la pudeur de le tenir à distance, rongé par le remord. J'ai été très touchée par cette façon qu'a Tony, alors qu'il sent le danger rôder, se raccrocher à sa fille, à sa femme aussi d'une manière silencieuse et désespérée.

« Gisèle souriait, d'un sourire bien à elle, très mince, qui étirait à peine ses lèvres, comme si elle s'efforçait de le garder à l'intérieur ».

Au fur et à mesure du récit, on se rend compte à quel point la routine, les traditions au sein du couple, sont rassurantes…Vouloir les pimenter peut couter cher, très cher. Car ne jamais oublier cela : « On ne passe pas sa vie sur un lit, dans une chambre vibrante de soleil, à subir la fureur de deux corps nus »…

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