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Critique de Henri-l-oiseleur


La collection "Mondes anciens" de Belin propose un volume sur le Japon des origines, de -36000 à l'An Mil. Deux auteurs ont veillé à cette publication, Laurent Nespoulous et Pierre-François Souyri, et leur livre relate l'histoire de l'archipel japonais des premières traces d'occupation humaine jusqu'à la fin de "l'Antiquité" locale, qui correspond au milieu de notre Moyen-Age.

Le volume bouscule un peu nos habitudes, car son découpage chronologique ne correspond en rien à ce que nous connaissons, et pour cause. Tardivement peuplé, l'archipel japonais a une histoire décalée par rapport à celle du continent eurasiatique. Les auteurs fixent à -36000 le premier peuplement, mais la fixation des périodes est rendue difficile par l'acidité des sols volcaniques, qui dissolvent vite les restes humains. D'autre part, l'archéologie permet d'observer que des phénomènes originaux se sont produits au Japon, qui distinguent cet espace des autres : la néolithisation, l'agriculture, les premiers états et chefferies doivent être repensés à la lumière des fouilles et des trouvailles. Les progrès techniques n'ont rien de linéaire, et certaines découvertes sont abandonnées si elles ne conviennent pas à leurs inventeurs. En somme, les grands schémas académiques ne sont pas toujours utilisables dans cette histoire ancienne, ce qui vient confirmer les observations d'Alain Testart sur l'esclavage et les sociétés de chasseurs-cueilleurs de l'Alaska, par exemple, ou de la Sibérie.

On se souviendra que ces périodes et ces concepts ne sont souvent que des commodités pour l'enseignement et l'étude : peu importe donc, si l'on nomme "Antiquité" les sociétés et la culture japonaises du VII°s au XII°s, alors que d'un point de vue européen, "notre" Antiquité commence avec l'écriture, vers -3000, et se termine au V°s. La lecture de la partie consacrée à la préhistoire plaira aux amateurs de poteries, de pointes de flèches et d'amas de coquillages ; pour ce qui est de l'Antiquité, née avec l'introduction de l'écriture chinoise (la première attestation est un sceau en or reçu par un chef japonais en 57 ap. J.C.), ce qui la distingue de la suite des temps est la présence d'un pouvoir impérial de plus en plus centralisé, utilisant à ses fins les apports de la culture chinoise filtrés par la Corée ou reçus directement. A la fin de la période, l'état japonais du XII°s établi à Kyoto se dissout dans les luttes entre grands féodaux.

C'est donc un magnifique volume, extrêmement bien illustré, mais écrit dans un style lourd et incorrect, à l'image du néo-français universitaire actuel. Les auteurs ne s'aventurent pas en un terrain inexploré : l'archéologie au Japon, associée au récit des origines, est née sous les Shoguns au XVII°s, a prospéré avec la restauration Meiji du XIX°s, et les questions qu'elle soulève touchent la nation et ses récits fondateurs. Un peu comme en Israël, l'histoire est d'une brûlante actualité.
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