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Critique de Luniver


Thrillers ésotériques, séries, films, mais aussi présents dans les discours politiques, les complots ont décidément la cote ! de quoi surprendre au premier abord, car les « preuves » de tels complots sont souvent des documents d'une naïveté confondante : « Bonjour, nous sommes juifs/franc-maçons/illuminati/extra-terrestres et terriblement maléfiques. Notre but est de vous réduire en esclavage, donc merci de ne pas vous remettre à croire en Dieu/retrouver une sexualité traditionnelle/planter des tiges de bambou dans votre jardin, sinon le plan qu'on prépare depuis 3000 ans tombe à l'eau lol. »

Dans cet essai, l'auteur tente de comprendre pourquoi les complots trouvent un écho aussi facile dans notre esprit. On peut citer plusieurs raisons. Tout d'abord, l'argument de la simplicité : tout le malheur du monde (situation politique, économique, abandon de mes traditions préférées, catastrophes naturelles) peut être expliqué par une seule cause, l'agissement d'un groupe secret dans l'ombre. Simplicité d'action également : puisque ces groupes misent sur le secret, il suffit de s'informer, et d'informer ses proches, pour déjouer leurs plans (et régler ainsi tous les problèmes de la planète).

Deuxième argument, la « revanche du Diable ». Notre esprit a absorbé depuis longtemps l'idée qu'il existe des entités maléfiques, qui font le mal car c'est dans leur nature et qu'il est vain d'espérer autre chose de leur part. le rationalisme a peu à peu écarté le diable, les démons et les sorciers des discours des grandes religions, mais les concepts restent ancrés en nous. Les théories du complot viennent réactiver cet imaginaire endormi et s'assurent ainsi de notre adhésion immédiate.

La fabrication de ces légendes est intéressante à plus d'un titre : elles font feu de tout bois et se bâtissent comme les rumeurs, quelle que soit la fiabilité de l'histoire, il en restera toujours quelque chose. Les récits de science-fiction, les supercheries avouées s'incorporent de la même manière : si l'auteur a choisi une fiction c'est pour se protéger et ne pas trop attirer l'attention, si le faussaire avoue la contrefaçon c'est pour sauver sa peau ou une énième manipulation destinée au grand public. Même les ennemis d'hier (juifs et nazis, franc-maçons et Vatican) finissent par devenir selon les besoins du moment des branches de la même organisation.

L'auteur tisse également un lien entre cet univers et l'extrême droite, dont les théories puisent systématiquement dans l'imaginaire ésotérico-complotiste (l'inverse n'étant pas nécessairement vrai). Cette partie est assez frustrante car si l'affirmation est lancée, on reste quand même sur sa faim quant aux arguments et études qui viennent la soutenir.

L'essai paraît solide et est soutenu par une quantité impressionnante de références. La lecture est fastidieuse par moment car l'auteur cite de nombreux passages de documents ésotériques qui ont tous la même rhétorique. Ils me paraissent néanmoins indispensables pour comprendre comment cette logique s'articule et comment ces théories se récupèrent toutes les unes les autres. le constat final est également mesuré et ne tombe pas dans le sensationnalisme : s'il est possible de tomber dans la paranoïa à force de lectures complotistes et d'en arriver à des actes extrêmes pour « se défendre », la plupart des amateurs de cet univers jouent simplement à se faire peur.
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