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Critique de nadejda


Un court mais beau moment de lecture qui met hors du temps, un flottement entre rêve et réalité. Où est le mensonge, où la vérité pour ces deux êtres qui se rencontrent lors d'une pluie d'orage : Sabri dont la femme s'est absentée, depuis le début de cet été 1942, avec leurs deux enfants pour rendre visite à son père à Antalya
et une jeune femme à la beauté troublante qui vient rompre sa solitude, mystérieuse apparition qu'il découvre trempée, appuyée à un palmier de son jardin. Que pourrait faire d'autre Sabri que de l'inviter à entrer dans sa maison sise sur les bords du Bosphore, pour qu'elle puisse se changer et se sécher ?


p 10-11 « Pendant qu'elle parlait, Sabri observait la blancheur limpide de son visage, ses cheveux châtain foncé, l'amande très régulière de sa figure. Peut-être était-ce cette blancheur et cette régularité qui lui donnaient l'impression de rêver. Elle était belle sans doute, et il avait accepté ce temps pluvieux comme s'il était venu avec elle, avec le rire clair de ses dents, sa joie docile et paisible.
(…) Et l'intimité brève et étrange qui bouleversa la vie de Sabri et qui le préoccupa pendant des mois commença avec cette rencontre.»

Cette jeune femme va tresser autour de Sabir une toile faite de ses « souvenances » qu'elle fait remonter de son passé dans un discours discontinu, qui la font apparaître chaque fois sous un angle différent, la rendant impossible à cerner, énigmatique et d'autant plus désirable.
Sabri va faire retour sur lui-même, c'est un miroir qu'elle lui tend : « Cette femme semblait être venue pour souligner toutes ses faiblesses » 

Alors qu'il aimerait la retenir, elle va le quitter en lui disant : « Je viendrai un autre jour. Alors je serai venue pour vous. Ce sera mieux. »

Elle va revenir et ils prolongeront leur première rencontre par une journée de promenade sur le Bosphore et ses rives où demeurent encore quelques yali (résidences secondaires des riches Stambouliotes datant du XIXe). D'une « ressouvenance » à l'autre Sabir va découvrir que cette jeune femme n'est pas apparue par hasard dans son jardin, que c'est son passé qui l'y a menée, qu'elle revisite pour tenter d'en exorciser les peurs et d'atténuer des souvenirs douloureux.

Cette rencontre, où l'eau est très présente, restera comme un beau rêve qui leur aura peut-être permis de se réconcilier avec eux-mêmes après avoir fouillé le passé.
«  J'aime tout ce qui vient des profondeurs, disait-elle. L'eau, le vent. Comme le vent entoure l'homme. Aucun bain ne rafraîchit autant. Surtout les vents des petits matins. »

J'ai aimé cette découverte d'un écrivain turc plus traditionnel que les deux femmes que j'ai précédemment lu avec passion : Tezer Ozlü et Sema Kaygusuz. Et je ne pense pas m'arrêter en si bon chemin.
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