AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Antyryia



J'ai le regret de vous annoncer qu'Antyryia s'est jeté par la fenêtre du troisième étage hier, et qu'il a atterri la tête la première sur le macadam. Autant vous dire qu'il n'en restait plus grand chose.
Je suis sa tante Harriette.
Mon neveu passait énormément de temps sur Babelio et même s'il n'a pas eu le temps de terminer sa dernière critique, je tenais à lui rendre hommage en vous restituant ce qu'il a eu le temps de rédiger à propos du récent roman de Franck Thilliez.

Il était pourtant tellement heureux le samedi 28 avril ! Il avait été à la médiathèque de Dainville où était organisée la sortie en avant-première mondiale du manuscrit inachevé et il était revenu tout rayonnant avec sa petite dédicace.
Il m'a notamment raconté que l'adaptation du film Puzzle avait été tournée et devrait être en salle courant 2019.
Il m'a appris qu'avec ce nouveau roman se déroulant entre la côte d'Opale et la région grenobloise, entre mer déchaînée l'hiver et montagnes enneigées, Thilliez avait essayé de créer un thriller à l'ambiance oppressante. Un roman dans lequel il avait procédé à une sorte de mise en abyme puisqu'un de ses personnages était également auteur de polars.
L'écrivain avait également annoncé que surprendre ses lecteurs, qui le connaissent bien désormais, était de plus en plus difficile mais qu'il avait essayé de les manipuler encore une fois en raisonnant différemment, en se mettant à leur place, pour que la surprise soit toujours au rendez-vous même chez les plus fidèles de ses fans.
Il m'a même fait part de l'intervention de l'adjointe au maire, dont le discours pertinent a permis de savoir que la lecture était une passion préférable à l'addiction aux tablettes ou aux films X ( sans blague ? ).

Et il s'est ensuite plongé dans son roman.
Il est resté enfermé chez lui, couvrant son cahier de notes, de réflexions, de formules mathématiques. Avant de s'arrêter à une vingtaine de pages de la fin et de se jeter par la fenêtre, encore incapable de résoudre l'énigme concoctée par le maître français ès thriller.
Je vous restitue donc au mieux le début de sa critique, qui devient de plus en plus chaotique au fur et à mesure.

* * *

En un mot : Vertigineux.
Pas de grande enquête scientifique en compagnie de Sharko et Hennebelle cette année, mais un one-shot à la construction magistrale. Rêver était déjà impressionnant de maîtrise en jouant avec les rêves et le temps, L'anneau de Moebius l'était également avec ses fenêtres futuristes, mais ici on est encore un cran au-dessus.
Le roman ne demande cependant qu'une seule fois un léger effort de la part du lecteur.
"Tu écris des choses tellement ... complexes et ... horribles."
Il y a donc plusieurs récits à l'intérieur du récit, et cette mise en abyme prend toute son ampleur au chapitre 4.
En effet, Léane Morgan, l'une des principales protagonistes du roman, est elle aussi un auteur de thrillers, qui plus est son dernier titre s'intitule le manuscrit inachevé. Et c'est la trame importante de son livre qui nous est alors révélé, elle même mettant en scène un auteur de thrillers avouant ses propres meurtres dans un roman inachevé. Dans un plagiat assumé de Misery de Stephen King, l'auteur sera séquestré par une institutrice qui l'obligera à écrire la fin de son livre, le torturera, et publiera finalement à son compte les aveux d'un véritable meurtrier.
"C'est de la fiction dans la fiction, vous voyez, ça reste donc de la fiction."
Sauf que vous retrouverez de nombreux éléments de cette histoire d'apparence très secondaire dans le récit principal. Comme des échos, des poupées russes qui n'en finiraient pas de s'empiler.
C'est comme si à l'intérieur d'une critique je publiais une autre critique, on ne serait pas sorti de l'auberge !
- - -
Salutations à toute la communauté Babelio.
Je profite qu'Antyryia se soit endormi pour vous dire rapidement ce que j'ai pensé du Manuscrit inachevé. Je suis sa compagne, Antyryiette.
Alors je ne vais pas vous rédiger quinze pages comme certains ( je ne vise personne, lol ), juste vous dire que le nouveau Thilliez est juste Fa-bu-leux, que je n'ai pas pu décrocher. J'ai vraiment vécu avec tous les personnages, je me suis faîte é-cor-chée, am-pu-tée, é-nu-clé-ée, en bref j'ai pris mon pied !
Je le déconseille aux âmes sensibles mais si vous avez envie d'une énigme bien tordue qui mettra vos nerfs et vos neurones à rude épreuve, foncez !!!
Vous allez vous faire char-cu-ter ! mdr ! ( 1 )
- - -
Il s'agit probablement du thriller le plus sanglant, le plus tordu et le plus éprouvant de l'auteur depuis ses premiers romans.

Deux histoires apparemment non liées constituent les trames du roman.

La première se déroule à Berck et ses environs et concerne donc cette femme écrivain, Léane. Voici quatre ans que sa fille Sarah a disparu. Et sa mort ne fait pour elle aucun doute puisque Andy Jeanson, meurtrier en série, était sur les lieux lors de la disparition. Derrière les barreaux depuis deux ans maintenant, il n'a cependant pas encore révélé l'emplacement du corps aux forces de l'ordre. Le manuscrit inachevé, le dernier roman de Léane, était comme une façon d'exorciser sa douleur, tandis que rien n'allait plus avec Jullian, son conjoint.
Ce dernier a refusé de croire à la mort de son enfant et a persisté à enquêter de son côté, s'acharnant au-delà de toute raison à croire à l'impossible. Le couple a fini par se séparer, leur façon de gérer la douleur étant trop différente. Qu'a découvert exactement Jullian ces dernières années ? Il est incapable de nous le révéler puisque suite à une agression, il a perdu la mémoire.

La seconde histoire se déroule au même moment, d'abord en Isère puis un peu partout en France.
Cette fois-ci le couple est formé par deux policiers : Vadim Morel et Vic Altran.
Le second a pour particularité de ne jamais rien oublier, pas le moindre évènement ou chiffre, à la façon de la jolie Poppy Montgomery dans la série Unforgettable.
"Vic souffrait d'hypermnésie, une faculté de tout retenir ou, plutôt, de ne rien oublier."
Beaucoup moins joli que l'actrice australienne : le cadavre qu'ils vont retrouver dans le coffre d'une ford grise accidentée. Une femme dont on a prélevé la peau du visage, les yeux, et dont on a tranché les deux mains. Afin de la rendre méconnaissable ? Les ramifications de leur enquête, qui ne fait que commencer, n'auront de cesse d'étendre leurs tentacules en formant une intrigue très dense dont il faudra démêler chaque fil. Pour quelle horrible vue d'ensemble ?
De quoi vous rendre complétement dingue ...

A partir de là la critique devient beaucoup plus confuse et consiste simplement en une série de notes prises rapidement. ( 2 )

- Deux histoires. Deux policiers surnommés V & V. Léane et son pseudo Enaël. Un amnésique et un hypermnésique. Tout marche par deux ? Pile ou face ? Deux tueurs ? Chambre 222. Il faut que je relise la page 22 et la page 222, l'indice qui me manque est forcément là, ça ne peut pas être un hasard.

- Un 4 X 4 parmi les véhicules cités.
4 X 4 ça fait 16.
16 X 16 = 256.
Et 256 c'est la moitié de 516 ! Comme par hasard c'est le nombre de cheveux qu'envoyait Andy Jeanson aux parents de ses victimes. 516 tueurs ?

- Tous ces personnages empruntés à Conan Doyle ... Watson, Moriarty, Adler ... Mais où est l'inspecteur Lestrade ?

- "Il y a forcément une explication à tout ce qui se passe." Mais laquelle ? Encore un indice, Jean-Pierre !

- Pizza, coca, eau, yaourts, pâtes, fromage, ketchup, dentifrice ( 3 )

- Toute l'histoire se passe aux alentours du réveillon de noël, qui ne sera pas festif pour tous les personnages. Le père noël pourrait-il être impliqué ?

- Et pourquoi tous ces palindromes surlignés ? DVD, Mammam, ressasser, Engage le jeu que je le gagne, 2882 ( le code de l'alarme ) et bien sûr Rêver : Thilliez n'en n'est pas à son coup d'essai et il est obsédé par les palindromes depuis longtemps.

- "Il ne faut pas toujours chercher derrière les écrivains de thrillers des êtres tourmentés ou des psychopathes." Et si l'auteur avait écrit ça pour que justement, on ne se méfie pas des romanciers ? Pour détourner notre attention ? S'il avait fait le coup ?
N'est-il pas question d'un auteur qui avoue tous ses crimes de façon détournée en écrivant un roman ?
Et si c'était ce qu'avait fait Franck Thilliez dans une ultime mise en abyme ? Avec la complicité de Caleb Traskman ?

Mais non ça ne colle pas comme scénario...
La réponse est sûrement dans la douleur.
"Jusqu'où pouvait-on aller dans la souffrance qu'on s'infligeait ?"
Je vais bientôt le savoir. Je vais ouvrir ma fenêtre et me précipiter dans le vide. Tout devrait alors me paraître évident.

* * *

"Il y avait, dans cette histoire, des noeuds plus obscurs, plus compliqués que ce qu'elle pouvait imaginer."
Autant vous l'avouer, ces noeuds, mon neveu ne les a jamais défaits même si quelques unes de ses réflexions étaient justes.
Paix à son âme.
Même s'il n'était pas très futé, c'était pas un mauvais bougre.

J'ai lu à mon tour ce fameux manuscrit inachevé qui l'a rendu complétement fou, et je dois dire qu'il m'en aura fallu du temps pour résoudre l'énigme, alors que tout était sous mon nez quasiment depuis le tout début ! Mais la réponse ne m'a sauté aux yeux que juste avant les révélations finales.
C'était vraiment un grand moment de lecture dont j'ai aussi bien apprécié le déroulé que la construction. Qui m'a parfois rappelé Hell.com de Patrick Senécal, avec ses entrées dans le Darkweb.
Le suspense a été omniprésent, Thilliez a réalisé un véritable travail d'orfèvre encore une fois où chaque petit détail prend tôt ou tard toute son importance.
Tout en nous malmenant, il nous permet de nous poser les bonnes questions au fur et à mesure que l'intrigue prend de la hauteur.
Je regrette simplement que la psychologie des personnages ne soit qu'effleurée au profit des multiples rebondissements. Quant à la fin, j'avoue qu'elle m'a laissé un goût amer, à la fois par son manque d'originalité, et parce qu'elle se base en partie sur une improbable coïncidence difficile à anticiper, alors que tout semblait pourtant jusqu'alors calculé au millimètre près.
Le manuscrit inachevé n'en demeure pas moins un très bon Thilliez qui propose un roman aussi original que marquant. Certaines scènes atroces, certaines perversions également, vont longtemps me rester en tête !


( 1 ) : Antyryia vivait pourtant seul à ma connaissance. Crise de somnambulisme ou tendance schizophrénique ? ( ndH )
( 2 ) : ndH ( note de tante Harriette )
( 3 ) : Je pense que mon neveu avait commencé à préparer une liste de courses. Il n'a jamais eu une alimentation très saine. Mais comme c'était dans son carnet, dans le doute, j'ai préféré vous restituer l'intégralité de ce que j'ai pu reconstituer. ( ndH )


Commenter  J’apprécie          13433



Ont apprécié cette critique (98)voir plus




{* *}