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Critique de mollymonade


On entend souvent dire qu'il serait impossible de publier Lolita aujourd'hui. Cependant Christophe Tison a osé se frotter à cet exercice périlleux en ressuscitant la sulfureuse Dolorès Haze , dite "Lolita", qui a vu le jour en 1958 pour sa parution américaine.
Alors que le roman de Nabokov se présente comme la confession d'un pédophile, celui de Tison est le journal intime de sa victime. On y découvre une gamine ordinaire, ni pire ni mieux que les filles de son âge et non une vilaine petite garce, "une allumeuse à qui la vulgarité offre un charme supplémentaire" comme se plait à la décrire Humbert, son odieux beau-père. Lolita est juste une enfant que l'on déprave mais dont les sens ne s'éveillent jamais sous les caresses du pervers. Seule au monde depuis le décès de sa mère, elle veut juste aimer et être aimée mais pas à la façon ultra-possessive et dévastatrice imposée par Humbert.

Tant d'années ont passé depuis que j'ai lu le roman de Nabokov et vu le film de Kubrick que je n'ai gardé qu'un vague souvenir de cette histoire. J'ai donc pu lire le journal de L. d'un oeil presque neuf, m'évitant ainsi la tentation saugrenue de chercher à comparer les deux ouvrages, et profiter pleinement de ma lecture.
J'ai beaucoup apprécié la façon dont il nous est donné de découvrir les pensées de cette gamine livrée aux mains d'un satyre. Le ton est vigoureux et même si parfois certains passages sont très crus, l'auteur ne verse jamais dans la crasse ou le misérabilisme de mauvais aloi. Le but de l'auteur n'est pas de faire pleurer Margot mais plutôt de rendre justice à Dolorès en dévoilant son vrai visage. En ne singeant pas l'original et en lui offrant la parole, Lolita devient enfin une vraie personne et plus seulement le symbole de la très jeune fille qui suscite le désir masculin. Rien de racoleur donc pour traiter un sujet sensible, plus que jamais d'actualité (cf le "lolita express" d'Harvey Weinstein, entre autres).
J'avoue que j'étais assez dubitative avant d'entamer ma lecture mais finalement, d'entendre la voix de Dolorès-Lolita m'a touchée plus que je n'avais osé l'espérer. Cette voix est un peu celle de l'auteur et de toutes les autres jeunes victimes d'abus sexuels qui n'osent pas parler par peur des menaces de leur agresseur ou crainte de ne pas être crues.

J'ai reçu Journal de L. dans le cadre d'une masse critique et je remercie les éditions Goutte d'or de m'avoir permis de découvrir ce roman passionnant et très joliment édité.
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