Une belle découverte. Porté par une écriture tout en rythmes et sonorités qui se répondent comme dans les rimes d'un poème,
Camille de Toledo mêle dialogues et dialogues intérieurs, photographies et papiers de famille pour partir à la recherche des traces laissées par la famille de Thésée.
Depuis Andrinople dans l'Empire ottoman où Talmaï et Nissim ont fréquenté une des écoles de l'Alliance Israélite Universelle, jusqu'à la France et Berlin, nous traversons plus d'un siècle d'histoire (la Grande Guerre, puis la seconde guerre mondiale, les Trente Glorieuses et jusqu'en 2019) avec Thésée et les siens. A rebours, par courts chapitres et va-et-vient entre passé-présent-futur, par des dialogues réels et imaginaires entre les vivants et les morts, nous cherchons avec lui le fil qui lui permettra de sortir du labyrinthe dans lequel les siens se sont perdus, ont perdu leur identité juive et le rapport à la prière, ont perdu la vie (se sont donnés la mort) et lui, Thésée a perdu sa santé.
Camille de Toledo retisse le lien entre les générations, interroge la question de la transmission mais aussi questionne notre société et l'histoire tourmentée du XXe siècle dans ce qui est certes un récit d'une profonde tristesse mais aussi une ode à la vie et à la réconciliation. le post-scriptum reprend la question de la transmission et du lien entre les générations et propose une réflexion nouvelle sur le suicide.
(p. 214)
et peut-être, finalement, est-ce cela que je cherche
en plus de relancer la vie
plonger dans le passé pour mobiliser les morts
pour qu'ils exigent que nous écrivions, en leur nom, une autre histoire à venir
p. 241
l'idée juste, profonde, qu'il y a un vaste lien des vies avec les vies, des morts avec celles et ceux qui naîtront, des ancêtres avec l'avenir, de la douleur avec la joie.