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Critique de flag_


Dans une ambiance toute Kafkaïenne, un homme se trouve comme échoué dans une ville étrangère et étrange, étouffante, au beau milieu d'habitants dont - à l'image du héros malheureux d'epépé de Ferenc Karinthy - il ne parle pas la langue. Pauvre hère errante, avec comme seule amarre sa chambre d'hôtel, notre ami va et vient, sans réelle destinée affirmée, souffrant de son obésité et d'un manque d'affection, aux prises avec ses monologues intérieurs, alternant les hauts et les bas, volonté et abandon, espoir et désespoir, empathie et mépris (que ce soit envers les autres ou envers lui-même). Comme dans l'impasse de sa vie, il tourne en rond, en proie à ses excès boulimiques répétés, seuls remèdes à ses sautes d'humeurs cycliques.
La ville oppressante et ses habitants inaccessibles renforcent encore la frontière entre notre malheureux et les autres, entre l'intérieur et l'extérieur, entre ses fantasmes et la réalité. Mais qu'importe. Car survient l'incident qui, paradoxalement, tombe à point nommé : à la suite d'une mésaventure improbable dont seul notre ami semble avoir le secret, il voit son pied gauche blessé, et de la blessure apparaître soudain … l'image de son ancien amour perdu, Suzanne.
Outre l'objet de son amour, Suzanne devient enfin, la présence et l'écoute, l'âme soeur prompte à recevoir ses monologues, la confidente (muette) à l'écoute de ses délires. « Je guettais, immobile, tous sens en éveil, les péripéties de la réalité. Maintenant qu'elle est auprès de moi, comme jadis, je n'ai plus besoin d'être attentif. Que la réalité aille au diable ! Je savoure la quiétude de ces retrouvailles toutes simples. » Mais la quiétude ne durera pas.
Vous froncez les sourcils ? Vous faîtes la moue ? Cette introduction vous laisse dubitatif et vous doutez d'y prendre plaisir ? N'ayez crainte. Une fois la main courante de la réalité tangible lâchée, laissez vous happer et porter par ce délire jubilatoire. Amour, désir, doute, jalousie, souffrance, violence, remords, repentance, désespoir,… au fil des péripéties et des quiproquos, Portrait en pied de Suzanne déploie, en accéléré et sur fond de surréalisme, toute la palette des sentiments humains, comme seuls les rabibochages amoureux bancals savent en engendrer en terres hostiles, mais au milieu desquels viennent s'immiscer des tranches d'humour caustique de l'auteur. le tout servi par une très belle réédition, aux belles illustrations, aussi troublantes que savoureuses.

Remerciements aux éditions Wombat, ainsi qu'à Babelio.
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