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Critique de MarcelineBodier


La toile raconte une histoire sur trois générations - le nombre qu'il faut pour fabriquer la folie, paraît-il. De fait, on suit trois petites-filles diversement fragiles, leur mère qui a vu se répéter un traumatisme déjà vécu par la grand-mère, Mamité, cadenassée dans son malheur... une famille de femmes, dont les hommes sont absents parce qu'une malédiction semble planer sur eux... Au rythme d'une écriture à la fois très entraînante et très littéraire, l'auteure nous fait vivre avec ses personnages qui vont, sur quelques mois, dénouer leurs entraves.

Mais alors, de quelle toile parle le titre ?

Est-ce celle de l'auteure ? Bien sûr. Frédérique Trimouille est peintre et lorsqu'elle écrit, on comprend enfin de l'intérieur ce que c'est qu'être peintre. C'est être au monde en relevant toujours les impressions colorées et en associant ces couleurs aux souvenirs, puis soudain, restituer tout le chemin parcouru sous forme de taches colorées sur une toile. Le point culminant du livre, c'est le moment où Clara peint : dans toutes ces couleurs avec lesquelles elle "joue", on reconnaît le violet de la mer dans la tache originelle de la toile, le turquoise d'une broderie dans la tache qui fait repartir le jeu qui s'essoufflait, le vert de la lumière bretonne dans celui qui contraste les souvenirs qui sont exprimés consciemment. On sait alors que cette toile, c'est sa vie.

Ce jeu de correspondances ne fait rien d'autre qu'illustrer le procédé du livre tout entier, qui déploie une histoire où les destins des personnages, d'abord apparemment disjoints (leur lien familial mis à part), se rejoignent, s'imbriquent et se révèlent au fur et à mesure qu'on apprend à les connaître. On lit une histoire, leur histoire, on la comprend, et on comprend aussi que son sens profond, c'est celui des liens entre eux, de la manière où ils se tissent ou pas, de la manière dont ils se disent ou pas. Il en est donc dans La toile comme dans la vie, bien sûr ; mais c'est toujours à notre insu que ces associations nous constituent, et il faut l'éclairage de l'art pour que nous puissions les voir. Une histoire particulière, un sens universel...

Mais alors, La toile, n'est-ce pas la nôtre, celle sur laquelle chacun de nous projette ce sens, son sens ? Évidemment. Finalement, peu importe l'histoire que raconte La toile de l'auteure : en la lisant, elle devient la nôtre, de la même façon qu'en regardant un tableau, il devient ce que nous y voyons. Moi, j'ai lu avec passion, me laissant porter jusqu'à ce que mes larmes jaillissent lorsque Mamité dénoue le noeud qui entravait sa famille, parce que c'est un noeud de la même nature (malgré son contenu différent), que j'ai besoin de dénouer en moi. Et vous ?
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