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Critique de piccolanina


" Tout condamné à mort aura la tête tranchée . "
J'aurai aimé vous apporter le sourire grâce à cette phrase mythique du " Schpountz " de Marcel Pagnol que Fernandel module sous diverses mimiques .
Mais le destin d'Etienne , qui sort à peine de l'adolescence , est trop précieux pour que l'on prenne à la légère son atroce découverte .

Habiter à Paris ne suffit pas à la belle couturière pour ne pas être rattrapée par un passé maudit .
Et pourtant , elle galère dans son atelier , entourée de ses ouvrières Marthe et Suzanne , tout en élevant avec amour et dignité son fils bien-aimé : Etienne .
Car elle l'adore , son gamin . Une véritable osmose s'est créée entre eux , peut-être un peu trop pour moi .

" Depuis qu'il vivait seul avec sa mère , Etienne avait pris l'habitude de l'appeler par son prénom .
(... )
Il la dominait de la tête . Elle était , sous son regard , si menue , si jolie , qu'il fut troublé .
(... )
Et soudain , d'une manière inattendue , ils éclatèrent de rire , debout l'un devant l'autre , unis par la conscience d'une heureuse complicité . " P. 14

Marion va s'absenter deux jours pour affaires .
Deux jours qui vont marquer son fils à tout jamais , à la réception d'une lettre et d'objets divers appartenant à son père , envoyés par la deuxième épouse avec de nombreuses doléances .
Celui-ci s'était remarié et puis est décédé dans un accident depuis des années , selon sa mère .

Intrigué , il questionne Marion , à son retour .

" _ Un sale individu , reprit-elle d'une voix sifflante .
(... )
_ Tu as tort de t'exprimer ainsi , maman . Il est mort ...
_ Oui , mort mais pas dans un accident , Etienne .
Ton père ... ton père a été exécuté ... P. 47

Comment accepter d'être le fils d'un assassin ?
Après quelques recherches dans de vieux journaux relatant " les exploits " de ce père guillotiné , il se sent pénétré des mêmes vices et défauts .

Comment va-t-il s'en sortir ?
Va-t-il grandir ?
La rage et la colère l'isolent de ses amis , de sa maman chérie qui se permet d'aimer un autre , au lieu de partager avec son fils le souvenir d'un homme exceptionnel ( pour lui ) .

L'auteur nous plonge , avec philosophie , dans le plus profond de notre âme . Il nous oblige à réfléchir à l'hérédité , la stupidité et la crédulité .
Il exhale sa colère par un vocabulaire riche , précis et sombre , spécialement lorsqu'il parle de la vieillesse , alors qu'il mourra très vieux :
" La vue de ces deux êtres ridés , voûtés , collés l'un contre l'autre , comme des naufragés sur un radeau , le combla d'une répulsion tranquille .
La mort était préférable à une pareille déchéance . Tout homme digne de ce nom devrait renoncer , par avance , aux tares hideuses de la sénilité . " P. 101
Par contre , ses mots sont colorés , tendres et rassurants lorsqu'il parle d'amour :
" Il rebouchait les flacons de parfum , revissait le capuchon du tube de dentifrice , rangeait les pots de crème sur la tablette du lavabo .
_ Quelle cuisine !
_ Il faut bien , â mon âge , dit-elle .
_ Veux-tu te taire ? Tu es belle et M. Joubert a bien de la chance ! " P.15

Le titre n'est pas anodin .
Il exprime parfaitement les états d'âme d'Henri Troyat qui prône le contrôle de soi et surtout la lucidité devant tout événement qui nous dépasse .

On a toujours le choix .
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